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Dommage qu'ils ne parlent que des bibliothèques, en oubliant les autres 
données numériques : médicales, retraites, bancaires, etc

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Accueil >> actualités : europe >> 25 mars 2008

ARCHIVAGE •  LES ÉCRITS AUSSI PEUVENT S'ENVOLER

http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=83925

On peut encore lire des textes vieux de 5 000 ans, mais pas le premier e-mail, 
envoyé il y a trente ans… A l'heure du tout-numérique, la conservation des 
documents se pose de façon aiguë, explique le quotidien suisse Le Temps.

        
C'est une histoire que se racontent les bibliothécaires quand ils parlent du 
temps. Acte un : en 1085, Guillaume le Conquérant, qui cherchait à se faire 
une idée précise du pays, envoya ses conseillers aux quatre coins de 
l'Angleterre pour en dresser un état des lieux, propriété après propriété. Ce 
document, le Domesday Book, est une source précieuse pour comprendre 
l'Angleterre au XIe siècle. Ce trésor est conservé depuis plus de 900 ans aux 
Archives nationales britanniques.

Acte deux : en 1986, pour marquer l'anniversaire de ce cadastre, la BBC 
[télévision publique britannique] lance une grande opération en demandant aux 
écoles de faire l'état des lieux de la Grande-Bretagne contemporaine. Textes, 
sons et images sont collectés sur l'ordinateur de la BBC et diffusés sur 
bandes vidéo et disques laser. Quinze ans plus tard, l'évolution de la 
technologie est telle qu'on ne peut plus lire ces données électroniques sur 
aucun ordinateur. Le Domesday Bis aura vécu soixante fois moins longtemps que 
son ancestral modèle. Nota bene : l'histoire finit bien, car après un 
fastidieux et coûteux travail de récupération, les fichiers de l'opération de 
la BBC sont à nouveaux consultables.

C'est la petite histoire qui trahit la grande. Alors qu'on peut encore lire 
des écritures d'il y a 5 000 ans (l'une des plus anciennes pièces de la 
Fondation Bodmer, à Genève, est une plaquette sumérienne de la ville d'Ur 
datant de trente siècles avant J. C.), la diversité des fichiers 
électroniques, la mutation rapide des formats et des supports capables de les 
lire rend la pérennité des écrits contemporains de plus en plus 
problématique. "Avec le temps, les supports voient leur capacité de stockage 
croître, mais ils durent de moins en moins longtemps", remarque Alexis 
Rivier, conservateur des nouvelles technologies à la bibliothèque de Genève.

On a longtemps laissé le temps faire son œuvre. "Des années 1950 à 2000 
environ", résume Marie-Christine Doffey, directrice de la Bibliothèque 
nationale, à Berne, "le monde de la conservation ne s'est pas assez préoccupé 
de l'avenir des fichiers électroniques." C'était l'époque où l'on croyait 
qu'il suffisait de stocker dans de bonnes conditions des données 
informatiques pour les conserver. "C'est ainsi qu'ont par exemple disparu 
toutes les informations de la NASA envoyées par les premiers satellites", 
ajoute Geneviève Clavel, responsable de la coopération internationale et 
nationale. On est également toujours à la recherche du premier e-mail, envoyé 
il y a une trentaine d'années…

Il semble à présent que nous soyons sortis de ce trou noir. Depuis l'an 2000 
environ, bibliothécaires et archivistes sont conscients que la conservation 
passive n'est plus suffisante pour espérer faire traverser les prochaines 
années aux écrits contemporains. Mais que faire ? "Face à la diversité des 
supports et des techniques, on est complètement désarmés", résume Silvio 
Corsini, conservateur de la réserve précieuse à la bibliothèque cantonale et 
universitaire à Lausanne. La méthode actuelle consiste à s'assurer 
régulièrement que les fichiers peuvent être ouverts et lus, quelle que soit 
l'avancée de la technologie. Pour ce faire, il faut recopier les données 
systématiquement dans d'autres écritures électroniques. Et ne pas croire que 
l'on fait un travail définitif : "Tout support a ses faiblesses. A part les 
stèles !" constate philosophiquement Silvio Corsini. "C'est aujourd'hui 
davantage un problème d'organisation et de décision politique qu'un manque de 
conscience ou de savoir-faire", précise son collègue genevois Alexis Rivier.
La Suisse n'est pas en retard dans le domaine. Au contraire. Depuis 2006, elle 
échange ses expériences au sein d'un groupe de travail de l'Unesco pour la 
préservation de l'Internet. Elle entreprend l'archivage de certains documents 
nés sous forme électronique, comme les thèses scientifiques ou les sites web 
d'importance historique. Durant les élections fédérales de 2007, les sites 
web des partis politiques ont été sauvegardés. Une expérience similaire sera 
menée durant l'Euro 2008 [championnat de football]. Mais la partie n'est pas 
gagnée. Comment archivera-t-on les romans pour téléphone portable qui font 
déjà fureur au Japon ? "Laissez-leur le temps d'arriver en Europe !" rit 
Marie-Christine Doffey.


Repères
• La Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne a fait le calcul : la 
durée de vie d'un texte est inversement proportionnelle à la place qu'il 
occupe sur son support. Ainsi, une tablette d'argile utilisée en Perse vers – 
2000" accueille" 5 signes (caractère ou espace) par centimètre carré, et a 
une durée de vie de 10 000 ans. A l'inverse, un DVD du XXIe siècle peut 
héberger 500 millions de signes/cm2, pour une durée de vie de dix ans. 
Quelque part entre les deux, on trouve le livre imprimé sur du papier 
chiffon, au XVIe siècle : 15 signes/cm2 pour une durée de vie de 500 ans.


Christine Salvadé
Le Temps
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