Mohamed FALL OULD OUMEIR, Directeur de publication de l’Hebdomadaire La Tribune
: ‘Nous sommes dans une ‘médiocratie’ depuis 30 ans’
Une des missions essentielles du prochain président de la Mauritanie, qui sera
élu le 25 mars prochain, sera de réussir le pari de (re)construire l’Etat
mauritanien. La conviction est du directeur de publication de l’Hebdomadaire
mauritanien, La tribune. A travers l’entretien qu’il nous a accordé, Mohamed
Fall Ould Oumeïr s’appuie sur le fait que depuis 1978, l’Etat mauritanien n’a
pas réussi à se remettre de son délabrement. Avec nous, il dégage les enjeux de
cette période d’entre-deux tours tout en tentant d’expliquer le pourquoi du vote
ethnique noté çà et là. Entretien.

ENTRETIEN AVEC... Wal Fadjri : Quels sont les enjeux de l’entre-deux tours ?
Mohamed Fall Ould Oumeïr : Les enjeux, à présent, c’est de refaire l’unité de
l’ancienne opposition autour d’Admed Ould Daddah du fait qu’en face, nous
avons, à travers la candidature de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, la
reconstitution du puzzle du pouvoir de Ould Taya. Un pouvoir auquel il ne
manque que la présence du président Taya, lui-même. L’enjeu normal est, pour
l’opposition naturelle du pouvoir, de se retrouver pour réussir le changement.
Il reste qu’il est dangereux et pernicieux de parler d’échec des militaires à
régénérer ou à promouvoir la régénérescence du monde politique mauritanien.
Quand ils ont commencé à interférer dans le jeu politique du pays, ils avaient
argué qu’il faut éviter la bipolarité. Malheureusement, nous revenons à cette
bipolarité entre l’ancien pouvoir et l’ancienne opposition. On revient au
départ. L’autre enjeu pour la Mauritanie est de réussir à passer le cap. Nous
avons eu des élections acceptées par tout le monde, des mécanismes
irréversibles qui ont assuré la régularité des élections et je crois que dans
le futur et même pour le second tour, il n’y aura rien d’extraordinaire. Je ne
m’attends pas à ce qu’il y ait quelque chose qui puisse remettre,
fondamentalement, en cause les acquis qui ont existé.

Wal Fadjri : En quoi ce refus de changement peut-il constituer un danger pour la
Mauritanie ?

Mohamed Fall Ould Oumeïr : Le danger, c’est d’abord d’avoir cette ‘médiocratie’
à la tête du pays. Nous avons toujours dit que le président Taya était
prisonnier de son environnement, de ses choix en terme d’hommes. On trouve que
tous les hommes qui ont, un moment donné ou un autre, participé au pouvoir de
Taya, se meuvent autour du candidat favori de cette élection.

Wal Fadjri : L’on dit que le vote identitaire a beaucoup joué au second tour…

Mohamed Fall Ould Oumeïr : Le vote identitaire est un phénomène passager. Ce
n’est pas, à mon avis, quelque chose que l’on peut rationaliser et prendre
comme quelque chose de normal. Je crois que si le candidat indépendant Ibrahima
Sarr a eu ce qu’il a eu dans la Vallée et dans le milieu négro-mauritanien,
c’est certainement parce que les problèmes de ces communautés n’ont pas été
sérieusement pris en charge par les autres candidats. Je m’explique : les
candidats comme Mohamed Maouloud, Messaoude Ould Boulkheir et Ahmed Daddah, ce
sont des candidats qui ont toujours pris ces problèmes en charge. Seulement,
ces dernières années et surtout pendant cette élection, ces candidats ont
tellement cherché le consensus au point qu’ils n’ont pas voulu aborder des
questions qui pourront fâcher. Une situation qui a été favorable à Ibrahima
Sarr.

Wal Fadjri : Mais le phénomène n’a pas profité qu'à Sarr. L’on dit que Zeine
Ould Zeindane en a, aussi, profité ?

Mohamed Fall Ould Oumeïr : Je pense qu’il ne faut pas exagérer aussi. On ne peut
pas aspirer à un destin national si l’on ne peut pas avoir 40 % de votants chez
soi. On le comprend parfaitement même dans les démocraties les plus élaborées
et les plus anciennes. C’est normal que Zeine, Daddah et les autres aient un
score honorable chez eux. Ce qui n’est pas normal, par contre, c’est qu’ils
n’arrivent pas à avoir un grand score chez eux.

Wal Fadjri : Quels peuvent être les défis du prochain président de la Mauritanie
?

Pour lire la suite:
http://www.walf.sn/international/suite.php?rub=6&id_art=36493

Propos recueillis par Elh S. Nourou DIA

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