"Jeune Afrique" no 2410 du 18 au 24 mars 2004
   
   
  Exemplaire
   
  " Reste aux Mauritaniens à aller jusqu’au bout d’un changement de régime que 
des officiers éclairés ont engagé avant de leur transmettre le témoin. Si tel 
est vraiment leur choix, le mieux placé pour l’incarner est sans conteste Ahmed 
Ould Daddah, dont l’opposition aux régimes militaires qui se sont succédé 
depuis 1978 ne s’est jamais démentie"
   
   
  
   « Un modèle pour les pays qui veulent instaurer des systèmes libres… » Même 
si elle émane d’un haut fonctionnaire du département d’État américain, pour qui 
l’existence de relations diplomatiques avec l’État d’Israël est partie 
intégrante dudit modèle, cette appréciation formulée le 12 mars, au lendemain 
du premier tour de l’élection présidentielle mauritanienne, sonne 
indubitablement juste. Ni trucage, ni bourrage, ni magouille, ni contestation 
des résultats par les quelque dix-huit candidats en lice : le phénomène est 
unique dans le monde arabo-musulman, rarissime sur le continent africain et 
d’autant plus remarquable que la Mauritanie n’a connu, après quarante-cinq ans 
de parti unique, qu’une très courte transition de vingt mois.
Pourquoi une telle aptitude à la transparence dans un pays où, jusqu’à une date 
récente, le résultat d’une élection se décidait habituellement dans le bureau 
du chef de l’État ? Le faible nombre des électeurs (à peine plus de 1 million, 
soit le tiers de la population de Casablanca et le quart de celle d’Alger), 
leur grande politisation et la propension à l’individualisme qui les 
caractérise ont certes facilité l’appropriation des valeurs démocratiques par 
les Mauritaniens. Mais ce qui a fait toute la différence réside dans la 
décision collective des militaires qui ont renversé le régime Ould Taya en août 
2005 de ne pas se succéder à eux-mêmes, dans leur capacité à tenir leur 
promesse et dans la neutralité « technique » qu’en dépit de bien des tentations 
(et de quelques hésitations) ils ont affichée jusqu’au 11 mars. Une attitude 
digne d’éloges, surtout quand on sait ce que nul n’ignore en Mauritanie : il 
aurait suffi au colonel Ely Ould Mohamed Vall de se présenter pour
 être élu.    
Certes, la démocratie à la mauritanienne comporte toujours sa part d’ombre. 
Rôle de l’argent, poids des allégeances tribales, nomadisme politique, reports 
de voix aléatoires tant les partis sont parfois des coquilles vides, difficulté 
pour un électorat géographiquement très dispersé de s’identifier à un leader 
national (une caractéristique qui explique le taux de participation nettement 
plus faible à la présidentielle qu’aux législatives)… Tout cela, à n’en pas 
douter, pèsera sur le second tour, le 25 mars. Mais s’agit-il vraiment d’une 
part d’ombre ? Ces manœuvres de salons et ces complots sous la khaïma sont 
plutôt une version locale des stratégies politiciennes inhérentes à toute 
période électorale.    
  Avant le 11 mars 2007, suspense et présidentielle étaient deux mots 
antinomiques. Aujourd’hui, ils vont de pair. Nul ne s’en plaindra. Reste aux 
Mauritaniens à aller jusqu’au bout d’un changement de régime que des officiers 
éclairés ont engagé avant de leur transmettre le témoin. Si tel est vraiment 
leur choix, le mieux placé pour l’incarner est sans conteste Ahmed Ould Daddah, 
dont l’opposition aux régimes militaires qui se sont succédé depuis 1978 ne 
s’est jamais démentie. À condition, bien sûr, que changement ne soit pas 
synonyme de revanche. 
   
  François Soudan


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