Pourquoi l'exigence d’un Gouvernement d’Union Nationale en Mauritanie?
   
  La démocratie n’a jamais été définie comme l’existence d’un pouvoir et d’une 
opposition, fut-elle la plus libre et la plus pugnace possible. Par contre, la 
démocratie c’est aussi le droit et la liberté de s’opposer au pouvoir en place. 
Si le pouvoir n’a ni le droit ni la légitimité de s’opposer à la liberté 
d’expression et de choix des acteurs politiques, il peut par contre avoir le 
devoir voire l’obligation morale et politique d’appeler l’opposition à 
participer à la gestion des affaires. Ceci compte tenu des urgences et des 
nécessités du moment, ou des rapports de forces en présence sur l’échiquier 
politique. L’opposition de son côté, malgré son droit à s’opposer, peut aussi 
avoir le devoir et l’obligation morale de demander un tel gouvernement et d’y 
participer. Un Gouvernement d’Union Nationale n’a jamais existé qu’en 
démocratie, ou dans un processus démocratique. Nous aurions été dans un régime 
totalitaire stalinien ou dans un simple régime à parti unique comme feu
 le PPM (Parti du Peuple Mauritanien) de Mokhtar Ould Daddah, nous n’aurions 
nullement débattu de la question. C’est dire que contrairement à certaines 
idées avancées ça et là pour des raisons plus ou moins obscures, le 
Gouvernement d’Union Nationale est une méthode de gestion politique éminemment 
démocratique. Il ne doit pas être confondu avec le système de cohabitation qui 
existe dans certaines démocraties comme la France. La cohabitation est 
l’exigence d’un régime parlementaire issu des urnes avec une assemblée 
majoritaire opposée au président de la république. Le gouvernement est dans ce 
cas formé uniquement par la majorité parlementaire. Dans un régime présidentiel 
comme celui des américains, malgré la domination des démocrates à la chambre 
des représentants, le gouvernement américain sera toujours formé par la 
minorité présidentielle des républicains de Georges Bush. Ce n’est pas aussi le 
partage du pouvoir entre sociaux-démocrates et démocrates chrétiens en Allemagne
 due à l’absence de majorité requise pour pouvoir gouverner seul. Les limites 
de l’exemple allemand c’est qu’il exclue les autres petites formations 
politiques non affiliées aux deux grands partis. C’est dire qu’un Gouvernement 
d’Union Nationale est avant tout une question de bon sens. Bon sens dans une 
volonté manifeste de trouver des solutions consensuelles aux graves problèmes 
qui menaceraient la stabilité voire l’existence même de l’Etat. C’est ce qui a 
été fait récemment au Congo ex Zaïre ou encore en Somalie.
   
  Qu’est-ce qui milite en faveur de l’exigence d’un Gouvernement d’Union 
Nationale en Mauritanie ?
   
  D’abord, il n’est nullement nécessaire de rappeler la période d’exception 
dans laquelle nous étions plongés avant le 05 août 2005. Les différentes 
tentatives de coups d’états depuis 1986 et la guérilla engagée par les FLAM en 
1990 doivent nous apprendre que rien n’est encore acquis en matière de 
stabilité et d’unité nationale. Certes Sidi Ould Cheikh Abdellahi a été élu 
soutenu principalement par le groupe « Mithaq »  issu principalement de 
l’ancienne majorité au pouvoir.  Mais le président élu, qui, rappelons le 
n’appartient pas au « Mithaq », a-t-il le devoir de remettre le pays entre les 
mains de ceux-là qui l’ont mis à sac et qui ne symbolisent désormais que 
souffrances, déportations, assassinats et gabegie au risque de dépouiller le 
coup du 03 août 2005 de tout son sens ? Les acteurs politiques qui n’ont pas 
soutenu SIDIOCA ont-ils le devoir de livrer les mauritaniens mains liés à leurs 
bourreaux d’hier ? Non. Cela nous semble inacceptable. Le fait que Messaoud Ould
 Boulkhaïr ait soutenu la candidature de SIDIOCA n’enlève en rien la volonté 
manifeste exprimée par le peuple à une majorité écrasante en faveur d’une 
véritable révolution. Non seulement les chiffres sont là et ils sont têtus, 
mais aussi le report de voix exprimé en faveur de SIDIOCA n’est pas seulement 
dû au ralliement de Messaoud, mais aussi et surtout au manque de crédibilité du 
candidat de l’ex-opposition au deuxième tour de la présidentielle en la 
personne de Ahmed Daddah. Si Ibrahima SARR est arrivé en tête des suffrages 
dans le sud du pays au premier tour, l’exemple de la ville de Djeol est un 
exemple patent de la sanction dont a été victime Ahmed Daddah de la part des 
populations négro-mauritaniennes principales victimes des folies meurtrières de 
Ould Taya. Monsieur SARR avait obtenu plus de 63% des suffrages au premier tour 
à Djeol, et au deuxième tour, malgré son ralliement à Daddah, ce dernier à été 
battu à plate couture dans la ville par SIDIOCA. C’est que le
 discours de Ahmed est fait de reniements et de volte-face depuis son 
apparition sur la scène politique il y a une quinzaine d’années. Par rapport au 
passif humanitaire et aux déportations, Ahmed Daddah a toujours agi comme s’il 
fallait en premier lieu défendre les intérêts des coupables avant de panser les 
plaies des victimes. Les noirs de Mauritanie ont désormais l’impression que 
Daddah les méprise, et cette impression s’est aggravée à la veille des 
élections quand il a déclaré à Jeune Afrique que l’arabité de la Mauritanie est 
plus évidente que son africanité. C’est ce manque de crédibilité qui en réalité 
a été à l’origine du choix de APP en faveur du soutient à SIDIOCA qui, avouons 
le, bénéficie d’une meilleure côte de probité malgré son entourage qui en 
réalité est aussi celui de son rival. Nous le savons tous, n’eût été le pouvoir 
discrétionnaire de Ould Maould dans son parti, l’UFP aurait pu basculer dans le 
camp de SIDIOCA à cause des mêmes problèmes que tout le
 monde a avec Ahmed Daddah. Ibrahima Sarr qui l’a soutenu avait déclaré 
auparavant qu’il était à égale distance des deux candidats.
   
  La démocratie, c’est le combat d’idées, c’est une lutte à travers les 
programmes politiques. Dans les véritables démocraties, on se plait à être 
opposant parce que le programme et les idées qui ont eu l’aval de la majorité 
des électeurs ne sont pas les nôtres. Mais en Mauritanie, à travers ces 
dernières élections, avons-nous vraiment assisté à un combat d’idées ? 
Franchement non. D’ailleurs, si au premier tour quelques candidats (Messaoud et 
Ibrahima) semblaient faire la différence sur les questions sociétales qui 
minent notre coexistence, au deuxième tour nous n’avons assisté qu’à un 
monologue de deux candidats qui se répétaient et qui défendaient ouvertement 
les mêmes positions à la télé et à la radio nationales. Sérieusement, s’il 
devait y avoir une opposition qui s’oppose et une majorité qui gouverne, Ahmed 
Daddah devrait rejoindre SIDIOCA au gouvernement et Messaoud Ould Belkhaïr le 
camp des Hannena et des Ibrahima Sarr à l’opposition. C’est dire que notre 
maturité
 démocratique n’est pas là.  Au premier tour, les négro-mauritaniens ont 
exprimé leur ras-le-bol à travers la personne de Ibrahima Sarr, Messaoud a 
bénéficié du vote haratin, Ahmed Daddah, SIDIOCA et tous les autres candidats 
ont engrangé les voix de leurs tribus respectives. Parler dans ce contexte de 
majorité qui gouverne et d’une opposition qui s’oppose, c’est opposer les 
tribus et les ethnies entre elles. 
   
  Amener l’ex majorité à gouverner seule, c’est refuser la résolution des 
questions nationales et du passif humanitaire, c’est valider encore cinq années 
de plus au profit de la gabegie et des violations des droits humains, c’est 
l’instabilité politique garantie à travers une majorité hétéroclite qui n’a de 
commun que les responsabilités dans les violations des droits humains sous la 
dictature ou encore l’ordre reçu de la part de certains militaires en faveur du 
soutien à SIDIOCA. C’est la confrontation assurée entre la Mauritanie des 
souffrances et celle des escrocs de la république. Quel poids pèserait l’APP 
seule face à la machine du Mithaq au sein d’un gouvernement ? L’acteur 
politique qui refuserait de participer à un gouvernement d’Union Nationale sera 
celui qui avaliserait et légitimerait les souffrances vécues par notre peuple 
depuis plus de deux décennies. Le Mithaq s’est prononcé, nous connaissons tous 
son projet politique, il n’est nullement celui défendu par
 SIDIOCA, mais celui du retour en arrière, du statut quo et de la délinquance 
légitimée. Je ne serais pas le premier à le dire, la balle est dans le camp du 
président.
   
  Amadou Alpha BA
   
   
    
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