EUPHORIE
   
  La Mauritanie traverse une période d’euphorie exceptionnelle suite à la 
conjugaison de facteurs ouvrant des espérances de changement tant au niveau des 
élites qu’au niveau populaire, conséquence :
    
   D’une transition réussie malgré ses amnésies, ses ratées et ses écarts ; 
réussite essentiellement liée à l’acceptation des principes de concertation et 
de consensus.  
   D’un processus électoral inaccoutumé duquel sortent des assemblées locales 
et nationales très mixtes et ouvertes avec des possibilités sans précédent de 
débats francs et intelligents.  
   L’élection sans contestation, et même reconnue par tous d’un homme réputé 
pour son expérience, sa mesure, sa probité et son sens de collégialité dans la 
direction des affaires publiques ; et surtout sa tolérance et son ouverture 
politique. Il en résulte d’ailleurs que s’il a des rivaux, il n’a pas 
d’opposants malgré les réserves dans les divers milieux.  
   De perspectives économiques séduisantes du fait des espoirs d’un afflux 
important de capitaux aussi bien au niveau multilatéral, bilatéral qu’au niveau 
des capitaux mixtes et privés ; le retour des sociétés bancaires-financières et 
commerciales françaises de traite muées en multinationales, le retour des 
investisseurs arabes en sont des signes que les désillusions entretenues sur 
les perspectives pétrolières du pays n’arrivent pas à décourager ; ni 
d’ailleurs l’épouvantail plus ou moins sérieux de la menace terroriste.   
   Des espoirs enthousiasmés de solutions de principe et d’actions conséquentes 
sur des questions de fonds ouvrant la porte au progrès général. Le consensus 
suffisamment large acquis sur des questions comme le passif humanitaire, les 
questions de démocratisation de la société et de la vie politique pour une 
Mauritanie démocratique, apaisée et bien gérée constitue le fondement sûr d’une 
telle vision.
   
  Témoignent de cette euphorie :
  -         Les interventions, propositions,  lettres ouvertes au Président de 
la République, aux membres du Gouvernement venant de tous les milieux, des plus 
modestes aux têtes pensantes, des individus aux organisations les plus variées, 
débordant dans les médias privés, et également publics depuis qu’ils se sont 
largement ouverts aux débats. 
  -         Les prises de position de quasiment toutes les  formations 
politiques en faveur de nombres de points de programme du Président de la 
République et la farandole de ces mêmes formations au Palais. 
  -         Le consensus largement dominant sur les principales questions 
débattues par les parlementaires en séance, mais également dans les médias 
publics ; au sein des concertations ; questions telles par exemple le retour 
des déportés mauritaniens au Sénégal ou sur les survivances de l’esclavage.
  -         Le fourmillement d’initiatives dites citoyennes ou de la société 
civile, avec ou sans le support des institutions publiques et/ou 
internationales, tendant à soutenir les initiatives du Président de la 
République ou prolongeant le consensus national des Journées nationales de 
concertation sous le régime de la Transition et, antérieurement lors de la 
concertation des partis politique et de la société civile sur l’invitation du 
RDU ou celle, sur l’initiative de OXFAM, des associations de la société civile 
qui donna naissance à l’Initiative femme pour la paix, l’unité et la concorde 
nationale IFPUCN.  
   
  Mais est-ce à dire que sous nos cieux, aujourd’hui, il n’y a pas de menaces 
de vents de sable ?  Les menaces sont certes moindres que les raisons 
d’espérer. Mais elles existent et elles sont nombreuses :
  ·        Une situation internationale caractérisée par des jeux de puissances 
impitoyables entre pays et entre les monopoles et où toute forme de légalité, 
de déontologie, d’humanisme n’est que dérision et phraséologie vide. Et la 
Mauritanie est en bonne dans ces enjeux tant pour des raisons géopolitiques que 
pour ses potentialités économiques et en ressources naturelles.
  ·        Un Etat hérité des régimes d’exception et du parti unique ruiné par 
le clientélisme, la gabegie et la corruption.
  ·        Emergence de monopoles privés en lieu et place des monopoles publics 
défiant toute régulation de l’Etat, piétinant toutes les règles de droit, 
menaçant aveuglement la paix sociale.
  ·        La prolifération de groupuscules politiques et religieux extrémistes 
et putschistes dont certains, passés maîtres dans l’art d’infiltration et de la 
manipulation des appareils répressifs de l’Etat, retrouvent, grâce à certaines 
rampes de lancement, les positions stratégiques pour leurs menées criminelles.
  ·        Une sérieuse menace de prise en otage de l’Etat par les 
narcotrafiquants.
  ·        Une situation sociale délétère suite à une détérioration sans 
précédent des conditions de vie des masses populaires victimes des calamités 
naturelles et des politiques de libéralisation sauvage en vogue ces dernières 
décennies, situation qui demande des mesures urgentes fortes et des stratégies 
convaincantes pour le cours et moyen terme.
   
  Que faut-il faire pour tirer partie avantageusement des points forts et 
endiguer les périls ?
  o       Surtout ne pas revenir en arrière soit vers le monolithisme, soit les 
pouvoir militaires. En ce sens, les initiatives actuelles pour prendre en otage 
le Président de la République par la mise sur pied d’un parti du Président nous 
ramène aux aurores de l’Indépendance avec l’absorption de la Nahda et des 
autres formations politiques par le parti du Président et la naissance du PPM 
qui stérilisera plus d’une décade toute la vie du pays ; hormis la contestation 
clandestine des kadihines victime d’ailleurs, en partie, de la récupération. Il 
est étonnant que Ahmed Baba Miské se prête à une telle entreprise.  A la suite 
de ce texte sera proposé un passage de l’ouvrage ardu, mais intéressant de 
Hamid El Mauritanyi, pionnier avec d’autres, dont Ahmed Baba, du combat 
patriotique, sur d’autres espérances déçues du fait des manœuvres des mêmes 
forces qui ont toujours mesuré le destin de la patrie à  l’aune de leurs 
intérêts égoïstes.
  Le président de la République, même au cas où il souhaiterait rempiler, 
devrait s’en tenir à sa propre expérience de candidat au-dessus des Partis. 
Quant aux besoins de la gestion quotidienne, durant le présent mandat, il 
devrait veiller à conserver la pluralité qui soutien son action. Toute 
formation constituée à partir des forces hétéroclites qui l’ont soutenu au 
premier tour qui viserait à l’isoler de ces alliances au second tour et des 
soutiens critiques après sa conduite consensuelle après le second tour ne sera 
qu’une force de régression qui finira par amener la rupture du consensus 
actuel, y compris d’avec les partis, comme le PRDS, le RDU, l’APP qui 
n’opteraient, éventuellement, que du bout des lèvres pour le monolithisme. Les 
milieux ‘’indépendants’’ et celui de nombreux groupuscules qui sont gravides 
d’un ou de plusieurs partis  n’ont qu’à se trouver un ou quelques leaders ou 
une forme de coalition avec un minimum de discipline sauvegardant la pluralité.
 Pourquoi ne pas prendre exemple sur la solution trouvée au niveau de 
l’Assemblée nationale pour la constitution des groupes parlementaires ? En tout 
cas de grâce pas de remake du PPM ou pire, du PRDS-militaro-affairiste. 
  o       Entreprendre une politique hardie et conséquente de reprise en main 
des forces armées et de sécurité en tant que forces apolitiques, citoyennes et 
républicaines ; loin des groupuscules politiques et religieux putschistes ; 
encore plus loin des cercles d’affaires monopolistes et mafieux. Et jouissant 
de toutes conditions matérielles, intellectuelles et morales pour mener leurs 
missions au mieux des intérêts de la patrie.
  o       La sauvegarde du pluralisme et du consensus actuels, la consolidation 
 de l’esprit de concertation et de recherche de programmes consensuels sur les 
grandes questions générales,  l’élargissement des acquis démocratiques, la 
promotion de la culture citoyenne et le bannissement de l’affairisme au sein 
des associations et des médias aideront certainement à enraciner les 
virtualités dont est grosse la conjoncture présente.
  o       La mise en place d’un gouvernement d’union national, ouvert d’abord 
aux forces présentes au parlement, mais n’excluant pas des tendances 
significatives, politiques et de la société civile, est une nécessité 
historique pour rompre clairement avec la tradition politique française héritée 
de la colonisation directe et indirecte qui ravage de nombreuses contrées sous 
influence de la pensée politique française de l’Etat-nation et de gouvernement 
de majorité partisane. C’est le seul instrument en mesure de faire enfanter 
l’euphorie actuelle de toutes ses potentialités.    
  o       Ce Gouvernement aura à lancer immédiatement : 
  -    la programmation  et la mise en oeuvre des actions en vue de la solution 
en cours des problèmes du passif humanitaire ;
  -         une intervention musclée conjoncturelle, sous l’égide des 
communautés de base et de leurs élus assistés par l’Administration, la Sonimex 
et le PAM, pour mettre à disposition des quantités suffisantes de vivres 
(céréales, protéines animales et végétales) à des prix modulés et accessibles à 
toutes les bourses ;
  -         définir avec précision le nombre et les catégories des victimes des 
désastres climatiques et de la péjoration de l’environnement et mettre sur pied 
un fond d’intervention en faveur des victimes des calamités naturelles.  
  -         lancer une évaluation d’ensemble de l’action gouvernementale dans 
tous les domaines et avec tous les partenaires nationaux et internationaux. Il 
sera certainement nécessaire à cette fin de mettre sur pied une commission 
comprenant toutes les institutions publiques nationales et des partenaires au 
développement, ainsi que toutes compétences mauritaniennes ayant la vocation du 
contrôle, que ce soit des ONGs ou des cabinets d’experts.
  -         Parallèlement aux actions prioritaires en cours pour résoudre 
certaines questions d’intérêt national objet d’un consensus assez large, 
relancer la concertation en vu d’arrêter sous forme d’un programme de 
gouvernement l’ensemble des questions ayant acquis le consensus national lors 
de concertations antérieures. 
   
  Souhaitons que le Pouvoir de Sidi ne gaspille pas les nouvelles chances de 
notre peuple comme Mokhtar qui acheva dans la catastrophique guerre du Sahara 
une marche triomphante entamée par les réformes de 73-74,  suivies par les 
amnisties de toutes les victimes des campagnes ininterrompues de répression de 
1966 à 1975 et couronnée par le Congrès du PPM  de 1975 scellant une large 
unanimité nationale. La période actuelle n’est certainement comparable qu’à 
l’euphorie de l’époque ; avec des facteurs en tout semblables à ceux de ces 
périodes.
  Malgré des graves signes, dont le moindre n’est pas la détermination de 
certains politiciens veules de stériliser la vie politique à travers un nouveau 
PPM-carcan, l’espoir demeure.    
   
   
   
   

       
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