----------------------------------- 
Une pensée pour nos frères déportés
-----------------------------------

Pendant l'élection présidentielle, la Mauritanie fut souvent comparée
à un bateau ivre que tout candidat promet de ramener à bon port. Sans
préjudice pour cette formule heureuse, on peut risquer la métaphore-
tout aussi mécanique- d'un avion otage sur sa piste d'atterrissage.
Pour détournements et endettements toxiques de la compagnie étatique
qui le pilote. 

Etoile filante
A l'instar du régime étatique qu'elle supporte, Air Mauritanie est une
entreprise multirécidiviste de l'atterrissage contraint et forcé. Mais
la mobilité réduite de ses avions tient surtout de la paralysie
générale du pays dont elle colporte les couleurs. Si haut. Si loin. Si
bas, en l'occurrence. Comme les bateaux qui peuplent nos cimetières
sous marins, son avion otage exprime ce quelque chose en nous de
mauritanien que l'on retrouve encore dans le parlement et le
gouvernement. 
Tant l'albatros d'acier se corrodant dans la solitude d'une piste
hostile révèle ce petit bout de nous qui dit un peu tout de chacun. «
Ses ailes de géant » qui l'empêchent de marcher, c'est notre poésie
organique qui ne nous permet plus de rêver. Comme le peuple se compose
une principauté poétique sur des lignes téléphoniques gratuites, la
compagnie attend des huissiers l'échéancier de son avenir coûteux.
Partout le même nationalisme déficitaire d'un état (d'âme) mauvais
payeur. Au mieux, un sursis chronométré pour l'entreprise. Au pire, la
victoire téléphonée d'une inspiration par décret. Dans tous les cas,
une étoile filante dans le ciel patriotique. C'est ainsi que, pour
solde de tout compte, le train de l'histoire humaine affiche ses avis
de tempêtes. 
Dans son envol, la firme infirme se crashe sous les hangars. Comme
elle, la transition démocratique débouche sur un labyrinthe
institutionnel. Un faux départ pour l'appareil de la compagnie
nationale. Un retour en arrière pour celui de l'état.  Dans son plan
de vol, Air Mauritanie se fait une routine des fréquences
budgétivores. A bord de son parti-état, le régime paramilitaire
consolide les passe-droits de ses paroisses.    

Ministère tous risques
Force est de reconnaître que Air Mauritanie est une compagnie aérienne
qui nous rend le ciel terre à terre. En cela, elle est l'expression
mécanique du pouvoir mafieux qui l'exploite. Elle incarne notre
croisière postcoloniale sous la bannière d'une république bananière.
La même souveraineté affectée sous domination étrangère. Fournisseurs
et actionnaires pour étouffer l'entreprise. Parrains putschistes et
leurs commanditaires pour asservir la nation. Une suite de périodes
rouges et de zones de turbulences en plein sous régime arbitraire.
Dans une similarité de condition entre la compagnie et le peuple de
passagers qu'elle transporte. 
Cette communauté de destin atteint son paroxysme quand, au sommet de
l'état, se retrouve un ancien pilote général de l'entreprise qui
périclite. En l'occurrence, le ministre secrétaire général de la
présidence. Un poste ambigu de vice-président de la république. Voire
un premier ministre bis occulte. A la tête d'une chefferie
interministérielle chargée du transport et rapatriement urgent de nos
frères déportés hors frontières. Tout en patronnant un parti-état où,
sans risque, leurs bourreaux pourront aggraver leurs dettes morales et
politiques. 
Pour rappel, il y a moins d'un an, c'est sous ce même « ministère tous
risques » que la compagnie moribonde a connu ses saisies les plus
fantastiques. En déportant sur les pistes des milliers de pèlerins
nécessiteux. 
Débarqué dans l'urgence, rien ne le prédisposait à retrouver si vite
les sommets de la bonne gouvernance. A moins de vouloir pénaliser le
retour des déportés. Notamment, en réhabilitant les causes et auteurs
de leur errance.  En tout cas, le chef du gouvernement en place ne se
le fait pas dire qui appelle à son cabinet un ami et collaborateur
fidèle.  Pour se prémunir contre l'activisme expansionniste d'un «
insaisissable » ministre secrétaire général de la présidence ?

Cheikh Touré
http://contre-x.blogspot.com/
Article paru dans La Tribune du 11 septembre 2007


_______________________________________________
M-net mailing list
M-net@mauritanie-net.com
http://mauritanie-net.com/mailman/listinfo/m-net_mauritanie-net.com

Répondre à