Da: Comité Surveillance Otan <info @ csotan.org>
Oggetto: Parution de ALERTE OTAN N°65 - 2e trimestre 2017
Data: 3 luglio 2017 18:18:32 CEST


ALERTE OTAN N°65 - 2e trimestre 2017

Sommaire

Editorial - Bruxelles 2017 : un Sommet OTAN très menaçant pour la paix mondiale

Contre-Sommet Otan :

- L'Otan, hydre tentaculaire [à lire ci-dessous]

- Montenegro: la neutralité du Montenegro, seule issue durable [à lire 
ci-dessous]

- Yougoslavie: comment les guerres yougoslaves ont (provisoirement) sauvé 
l'Otan [à lire ci-dessous]

- Serbie 1999: bombardements à l'uranium appauvri

- L'Ukraine et l'Otan

Nouvelles violences en Ukraine

Star Wars, de la fiction à la réalité

Hiroshima: en finir avec l'arme nucléaire

Commémoration Bombardements Hiroshima et Nagasaki


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L’Otan, hydre tentaculaire

par NILS ANDERSSON

A la Conférence du Contre-Sommet Otan du 25 mai 2017, la première session 
plénière a entendu une intervention de Nils Andersson intitulée: «L’Otan, hydre 
tentaculaire». Ci-dessous nous publions l’essentiel de son contenu.


A quoi sert l’OTAN ? Une organisation militaire sert à faire la guerre. De 
cette évidence découlent deux
interrogations, la guerre pour qui et la guerre contre qui ? L’OTAN a été 
fondée il y a soixante-huit ans comme dispositif militaire pour, dans la 
confrontation entre deux systèmes économiques et sociaux irréductiblement 
opposés, le capitalisme et le socialisme, défendre les intérêts idéologiques, 
politiques et économiques du monde occidental.

La signature du Traité de l’Atlantique Nord a été un acte majeur de la guerre 
froide, avec un double objectif, légitimer la présence de bases étatsuniennes 
en Europe et constituer une coalition armée du camp occidental contre l’Union 
soviétique qui y répondra par la formation du Pacte de Varsovie. Ce fut
le rôle de l’OTAN jusqu’à la chute du Mur en 1989, avec des moments de fortes 
tensions, sans jamais que l’Alliance atlantique ait à tirer un coup de canon.

L’implosion du bloc soviétique va mettre en question la raison d’être de 
l’OTAN, mais son secrétaire général, Manfred Wörner, fait clairement entendre 
qu’il n’en est rien : « Seule l’Alliance atlantique peut lier les Etats-Unis et 
le Canada à l’Europe, elle seule peut assurer que le changement s’instaurera 
sans crainte de revers ou de volte-face. Elle seule peut coordonner la 
stratégie globale de l’Occident pour la paix et la garantie des valeurs 
démocratiques dans une Europe nouvelle. Elle seule peut ancrer à l’Ouest une 
Allemagne unie dans des conditions de sécurité maximales pour ce pays et pour 
ses voisins.(17 mai 1990) ».

L’OTAN est le pilier qui lie les atlantistes européens derrière la bannière 
étoilée, pour George Bush père, elle est une pièce maitresse des plans 
hégémonistes des États-Unis dans le Nouvel Ordre Mondial, les uns et les autres 
s’emploient à défendre son maintien. C’est chose faite en 1991, la « permanente 
validité » de l’Alliance atlantique est affirmée dans la Déclaration de Rome et 
un « nouveau  concept stratégique » est adopté, selon lequel l’OTAN, présentée 
jusqu’ici comme une « alliance exclusivement défensive », devient une force 
interventionniste. Mission lui est donnée d’assurer sur le continent la 
stabilité du Nouvel Ordre Mondial par l’intégration militaire de sa partie 
orientale et, alléguant les carences des États européens, en intervenant dans 
les Balkans.

La guerre dans les Balkans, va servir à justifier la pérennisation de l’OTAN. 
Le 28 février 1994, l’aviation
états-unienne intervenant dans le cadre de l’OTAN, abat des bombardiers 
bosno-serbes, la Bosnie est la
première guerre chaude de l’OTAN. Au Kosovo stratégie géopolitique et mission 
idéologique conjuguées, avec la résolution 1244 on entre dans l’illégalité en 
violant la Charte des Nations Unies, passant outre le rôle du Conseil de 
sécurité et du fantomatique Comité d’État-major de l’ONU de « fixer les 
effectifs, le degré de préparation des forces et leur emplacement général », 
l’OTAN est seule aux commandes. Cette instrumentalisation de la Charte ouvre la 
voie aux guerres à venir.

Dès la dissolution du bloc soviétique, la politique de partenariats va être un 
mécanisme essentiel d’élargissement de la pieuvre otanienne. En 1991, est 
constitué, le Conseil de coopération euroatlantique (devenu le Conseil de 
partenariat euroatlantique) qui, symbolisant la victoire politique et 
idéologique des atlantistes va réunir les vingt-deux États membres de l’OTAN, 
la Russie, les États de l’ancien Pacte de Varsovie, les onze États de la 
Communauté des États indépendants et l’Albanie. Ce partenariat va être adoubé 
en 1994 d’un Partenariat pour la paix intégrant également les États européens 
non membres de l’OTAN, avec pour objectif, de « se doter de forces plus en 
mesure d’opérer avec celles des membres de l’OTAN ». En 1994 également est 
lancé le Dialogue méditerranéen avec la Mauritanie, le Maroc, l’Algérie, la 
Tunisie, l’Égypte, la Jordanie, et… Israël, qui élargit les partenariats de 
l’OTAN à l’Afrique du Nord et
au Proche-Orient.

Parallèlement, l’OTAN modèle l’Europe en réorganisant le dispositif de défense 
et en normalisant les équipements militaires des pays ayant appartenu au Pacte 
de Varsovie et à partir de 1999, bafouant les engagements pris lors de la 
réunification allemande dans le Traité 2 + 4, l’OTAN, précédant leur adhésion à 
l’Union européenne, intègre successivement ces pays et étend sa toile en Europe 
centrale,
orientale et balkanique vers les frontières de la Russie.

Avec le « concept stratégique pour le XXIe siècle »  
<http://www.nato.int/nato_static/assets/pdf/pdf_publications/20120214_strategic-concept-2010-fra.pdf>adopté
 lors du Sommet du cinquantenaire à Washington en 1999, qui fixe comme objectif 
de « sauvegarder, par des moyens politiques et militaires, la liberté et la 
sécurité » de l’Amérique du Nord et de l’Europe, on entre dans sa phase de 
globalisation, il est décidé que « les forces de l’Alliance peuvent être 
appelées à opérer au-delà des frontières de la zone euro atlantique. »

Jusqu’ici organisme de « défense régionale », l’OTAN devient le bras armé de la 
mondialisation néolibérale. Avec le concept stratégique pour le XXIe siècle, on 
entre dans le cycle de la guerre permanente de Georg Bush junior et de son 
administration. Les interventions de l’OTAN ou de coalitions occidentales, avec 
un mandat du Conseil de sécurité de l’ONU, en Irak, Afghanistan et Libye, sous 
couvert du « droit d’ingérence humanitaire », puis du « devoir de protéger » 
vont être cause de chaos et abominations.

L’objectif d’une OTAN planétaire est de « chercher à établir de plus en plus de 
partenariats mondiaux avec des pays de même sensibilité » ; ainsi, est lancée 
en 2004, l’Initiative de Coopération d’Istanbul avec le Bahreïn, les Émirats 
arabes unis, le Koweït et le Qatar puis, dans le cadre du Global Nato, sont 
conclues des « activités en coopération », avec l’Irak, l’Inde, le Pakistan, 
l’Afghanistan, la Mongolie, la Corée du Sud, le Japon, l’Australie, la 
Nouvelle-Zélande et la Colombie.

Pour que l’OTAN soit en mesure de se projeter tous azimuts, en 2006, lors du 
sommet de Riga, il est décidé de la doter d’une capacité de mener simultanément 
deux opérations de grande envergure, requérant 60 000 hommes chacune, et six 
opérations moyennes de 30 000 hommes, soit une projection opérationnelle de 300 
000 hommes !

En 2007, Daniel Fried, Secrétaire d’État adjoint étatsunien peut déclarer : « 
Depuis la guerre froide et son rôle régional dans les années 1990, l’OTAN s’est 
transformée en une organisation transatlantique effectuant des missions 
globales, de portée globale avec des partenaires globaux. Tout appartient 
potentiellement à la zone de l’OTAN ».

Si les objectifs de l’OTAN sont pérennes, le cours de l’Histoire ne l’est pas, 
la crise économique et financière entrave une projection mondialisée de l’OTAN, 
la Force de réaction rapide de l’OTAN de 300 000 hommes restera, avis d’experts 
: « une Rolls-Royce qui n’est jamais sortie du garage ».  Bien qu’il ne soit 
pas un État dans le monde doté d’une puissance de feu et d’une capacité de 
déploiement plus grandes que les États-Unis, bien qu’il n’a pas existé dans 
l’Histoire une coalition disposant de moyens militaires et logistiques 
équivalents à ceux de l’OTAN, les puissances atlantistes n’ont gagné aucune des 
guerres asymétriques engagées depuis quinze ans et ont connu des échecs 
militaires en Irak et en Afghanistan, la Libye est une zone de non-droit, les 
Balkans sont instables, s’ajoute l’effrayant engrenage syrien et les lieux de 
conflits ouverts ou potentiels s’étendent sur un arc allant des Philippines au 
Nigéria. L’euphorie des années 1990 et du tournant du XXIe siècle n’a plus 
cours.

Réalités géopolitiques, échecs militaires sur le terrain et crise financière, 
l’OTAN a réduit ses interventions hors zones. En février 2011, seulement en 
Afghanistan, 132 000 soldats étaient engagés dans la FIAS, en novembre 2016, 
ils ne sont que 18 000 à être déployés dans des missions de l’OTAN. Si elle 
fournit toujours des appuis logistiques, de formation et des financements 
(comme l’a confirmé le récent Sommet de Bruxelles s’agissant de l’engagement de 
l’OTAN contre l’Etat islamique), l’OTAN n’est plus aux commandes d’opérations 
majeures hors sa zone historique. Un autre fait va modifier le rôle de l’OTAN: 
en 2015, la Chine, considérée par Washington comme la menace principale à moyen 
terme, la nouvelle stratégie du Pentagone est de « concentrer sa présence, son 
pouvoir de projection et sa force de dissuasion en Asie-Pacifique ».

La vision d’une OTAN globale se trouve modifiée par le transfert du centre de 
gravité de défense des Etats-Unis vers l’Asie orientale et le Pacifique et les 
plans de créer une « OTAN » sud-est asiatique. La zone euro atlantique n’étant 
plus, pour les États-Unis, l’épicentre de sa stratégie, globale, s’ensuit la 
demande aux États européens d’Obama puis de Trump, d’apporter une contribution 
financière
plus importante à la défense du continent et de sa périphérie, les fameux 2 % 
du PIB en dépenses militaires.

Cela étant, pour le Pentagone, l’OTAN et l’Europe sont un rouage essentiel de 
son dispositif stratégique global. Une Europe sous commandement du Pentagone, 
le commandant des Forces des États-Unis en Europe (l’EUCOM) étant 
automatiquement le commandant suprême de l’OTAN. Une Europe incluse dans le 
système global de défense des États-Unis avec des bases militaires en 
Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Espagne et dans sept autres pays européens, 
ce à quoi s’ajoute la VIe flotte US en Méditerranée.  Une Europe intégrée dans 
le système mondial d’écoutes et d’espionnage politique, économique, militaire 
du réseau Echelon avec en Grande-Bretagne le plus important centre d’écoutes 
dans le monde de la NSA. Une Europe englobée dans le dispositif du bouclier 
antimissile ABM avec la base opérationnelle de Deveselu en Roumanie, une base 
en installation en Pologne et quatre destroyers dotés de capacités antimissiles 
basés en Espagne. Une Europe engagée dans la guerre des drones, la base de 
Ramstein, en Allemagne servant de station relais à la base de Creech, au Nevada.

Le repli d’une OTAN globale sur sa zone historique euroatlantique ne modifie en 
rien sa raison d’être.
L’Europe répond toujours à la projection du géographe Mackinder, qui fonde la 
stratégie de Brzezinski : « qui domine l’Eurasie domine le monde ». La Russie 
est une pièce maitresse de cet enjeu, y compris pour l’endiguement de la Chine. 
D’où la politique interventionniste et d’extension de l’OTAN sur le continent 
dans ce qui est considéré par la Russie comme son « espace vital », ce qui a 
créé une situation de guerre en Ukraine.

Dans le cadre de l’opération Atlantic Resolve pour la première fois depuis la 
fin de la Seconde Guerre mondiale des manoeuvres de grande envergure (25 000 
hommes et plus) se sont déroulées dans la partie orientale de l’Europe et au 
terme de ces manoeuvres plus d’une centaine de blindés US ont paradé sur 1 800 
km, des Pays baltes à la Bavière. En janvier 2017 sont arrivés des États-Unis, 
3 500 soldats, 87 tanks, 18 canons automoteurs, 419 voitures tout terrain, plus 
de 2 000 autres véhicules militaires, déployés dans les pays baltes, en 
Pologne, Hongrie, Roumanie et Bulgarie.

Pour assurer une présence avancée et adapter l’OTAN « aux défis et aux menaces 
se développant » à sa périphérie il a été décidé lors du sommet de Cardiff en 
2014, le triplement des effectifs de la NRF (Force de réaction rapide), la 
création d’une force opérationnelle interarmées à très haut niveau de 
préparation et le renforcement des forces navales permanentes. Pour permettre 
une plus grande réactivité au déploiement de ces forces spéciales, il a été mis 
en place huit Quartiers généraux dénommés Unité d’intégration des forces de 
l’OTAN (NFIU), basés en Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, 
Bulgarie, Hongrie et Slovaquie. Les pays occidentaux disent craindre la Russie, 
la Russie se sent agressée par l’Occident, il faut rompre cet engrenage funeste 
dans lequel l’OTAN joue un rôle belliciste.

Succédant au Général Breedlove qui s’est singularisé par des déclarations 
considérées comme outrancières même au sein de l’OTAN, le général Curtis 
Scaparrotti est devenu le nouveau Commandant suprême de l’OTAN (SACEUR). Lors 
de sa prise de fonction, il a précisé que le « théâtre européen est essentiel 
pour les intérêts de l’Amérique et que l’OTAN reste la clé de la sécurité
nationale pour les États-Unis » et ses déclarations ne sont pas moins martiales 
que celles de son prédécesseur quand il déclare :

« À l’est, une Russie renaissante est passée d’un partenaire à un protagoniste 
qui cherche à saper l’ordre international et à se réaffirmer en tant que 
puissance mondiale » et de poursuivre « pour lutter contre les menaces 
auxquelles nous sommes confrontés. […] nous retournons à notre rôle historique 
en tant que commandement de guerre ».

(zone militaire, 4 mai 2017)

La guerre pour qui, la guerre contre qui ? Si on est passé d’un discours 
hégémonique à un discours de défense de l’Occident, cela ne change ni son rôle 
ni sa nature. L’OTAN doit être dénoncée et combattue comme un acteur essentiel 
de vingt-cinq ans de guerres dites « justes », qui sont la cause de pays 
ravagés, de peuples meurtris, de la plus grande crise migratoire depuis la 
Seconde Guerre mondiale, de fanatismes exacerbés et mortifères.

Il faut dénoncer et combattre l’idéologie atlantiste fondée sur le leadership 
des États-Unis, la domination des puissances occidentales et la soumission du 
monde à l’économie de marché, il faut dénoncer et combattre la militarisation 
des pays de l’OTAN et de ses alliés, une logique de guerres dont les peuples 
sont toujours les principales victimes, il faut dénoncer et combattre 
l’engrenage militaire et la politique de tension dans la partie orientale de 
l’Europe et faire prévaloir la négociation. Il faut se libérer de l’allégeance 
à l’OTAN, hydre tentaculaire et il faut encore et toujours lutter pour sa 
dissolution.

Nils Andersson, 25 mai 2017


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La neutralité du Monténégro est la seule issue durable

Parler du petit Monténégro peut sembler inintéressant dans un contexte 
géopolitique global. Cela peut sembler prétentieux. Mais ce ne l'est pas. Le 
Monténégro est tout à la fois un repère, un signe, un message. Notre cas 
comporte des leçons spécifiques de grande importance.

Il révèle la véritable nature de l'Alliance Atlantique, mieux que tout autre 
exemple dans l'histoire moderne de l'Otan, excepté bien sûr les bombardements 
et les agressions de l'Otan partout dans le monde.

Le Monténégro est confronté à une question historique, sans avoir la 
possibilité d'y répondre! Les autorités du pays, contre la volonté d'un nombre 
écrasant de citoyens et craignant celle-ci, ont décidé récemment de faire 
ratifier par le parlement un accord pour adhérer à l'Otan. Ce parlement est 
illégitime, il résulte d'élections frauduleuses, il a été établi suite à un 
"coup d'état" mis en scène. C'est un épilogue inédit après trois décennies de 
pouvoir.

La ratification du protocole d'entrée du Monténégro à l'Otan, soutenue par un 
Parlement tronqué, par des institutions et des structures politiques 
criminelles, qui ne protègent que des intérêts personnels et des propriétés 
acquises illégalement, n'est rien d'autre qu'une agression politique légale de 
l'Otan – ou de pays complices – contre le petit Monténégro.

Le Monténégro a souffert d'un double impact. L'impact extérieur vient de 
l'Alliance atlantique, qui nous a envoyé en 2015 une invitation à adhérer. 
L'autre impact provient de l'intérieur, des 30 ans d'imposition du régime de 
Milo Djukanovic et de sa clique mafieuse criminelle. Nous sommes entre le fer 
et l'enclume, entre deux forces non démocratiques et criminelles. La première 
est globalement représentée par Washington, la seconde provient de Podgorica. 
La pression est immense.

A qui l’OTAN a-t-elle envoyé son invitation, et qui sont ses partenaires au 
Monténégro ? Le gouvernement monténégrin fonctionne comme une mafia moderne. 
C'est un système mafieux qui, pour préserver le pouvoir et les privilèges d'un 
petit groupe de gens autour de Milo Djukanovic, qui a déjà été 7 fois Premier 
ministre, utilise les institutions comme une façade. Il s’agit donc d’une 
démocratie de façade qui, avec le temps, est devenue une dictature ouverture, 
comme on l'a vu en octobre dernier quand, le jour même des élections, 
Djukanovic, craignant le changement et une révolte citoyenne, a monté un pseudo 
coup d’Etat.

Derrière cette façade, se cache le crime organisé. Il y a des élections, mais 
elles sont truquées. Il y a des institutions, mais elles sont privatisées. Il y 
a la liberté d'expression, mais si vous critiquez le Premier ministre et ses 
petits amis, vous restez sans boulot, vous subissez des menaces, vous mettez en 
danger votre sécurité et celle de votre famille, vous pouvez être blessé ou 
même tué, vous pouvez être jeté en prison. C'est ce qui m'est d'ailleurs arrivé 
juste avant de venir ici.

Un exemple illustre ce qu'est le premier homme de ce petit pays : Djukanovic a 
été caractérisé par la Justice italienne comme "un dangereux criminel 
international", dont le nom se trouve parmi 15 suspects d'association mafieuse 
et dont le cas n'a pas été classé.

Je cite cet exemple, non seulement pour dénoncer le gouvernement monténégrin et 
son homme fort, mais pour montrer avec qui l'Otan veut s'allier. Il est curieux 
qu'un tel individu soit le principal protagoniste de l'intégration à l’Otan. Y 
aurait-il une erreur quelque part ? Si l'Otan est réellement ce qu'elle prétend 
être – c.à.d. une organisation démocratique, qui chérit les vraies valeurs de 
la démocratie – comment peut-elle soutenir un tel dirigeant ?

Tout ceci ne dérange pas les partenaires de l’Otan de Djukanovic. Au contraire 
: il y a quelques années, un haut diplomate des Etats-Unis, Philip Reeker, 
alors adjoint du vice-Secrétaire d’Etat, a dit à propos de Djukanovic: "je le 
connais très bien. Je l'ai rencontré de nombreuses fois, je le considère comme 
un ami parce qu'il comprend bien toute cette région. Il pense stratégiquement… 
Et, comme je l’ai dit à Djukanovic et à ses ministres, nous avons hâte de 
poursuivre notre étroite coopération".

Ce n'est pas un hasard. L'Otan n'est pas intéressée par l’Etat de droit ou des 
choses comme ça. La seule chose qui l'intéresse, c'est la géopolitique et la 
défense des intérêts occidentaux, menés par Washington, par l'oligarchie 
militaro-financière des multinationales. Ce qui est important pour l'Otan, 
c'est la loyauté et l'obéissance. Ils ont peur, plus que tout, de ce que Noam 
Chomsky a appelé "la désobéissance réussie". Autrement dit, ils ont peur de la 
souveraineté.

Le Monténégro de Djukanovic est un bastion antirusse, une zone de propagande et 
d'hystérie, et c'est à ce moment que le gouvernement criminogène introduit la 
demande pour devenir membre de l'Otan, contre la volonté du peuple.

Une question se pose: Pourquoi le Monténégro est-il important pour l'Otan ? Ils 
le disent ouvertement : c'est pour compléter le puzzle, pour compléter la 
militarisation des Balkans. Le Monténégro représente la dernière étape pour 
atteindre la Serbie, qui pourrait ainsi terminer la militarisation et 
l'intégration totale des Balkans dans l'Otan. La Croatie et l'Albanie en sont 
déjà membres, ainsi que la Slovénie. La Bosnie-Herzégovine, ainsi que le 
Kosovo, sont sous protectorat. Pour le moment le Monténégro est antiserbe, mais 
il est aussi utilisé comme pion contre la Russie. Tel est le modus operandi. 
Taiwan est antichinois, l'Ukraine est antirusse, la Biélorussie semble 
également devenir antirusse.

L'agenda est clair: ils suscitent des divisions nationales, soutiennent des 
régimes antidémocratiques qui leur servent de marionnettes et transforment les 
pays en républiques bananières. Ces pays ne sont plus souverains, ils sont 
colonisés par le néo-libéralisme au moyen de la dérégulation, la 
désindustrialisation et la privatisation totale. Cela plonge ces pays dans la 
pauvreté et accroît les moyens de les contrôler.

Les pays membres - et non-membres - de l'Otan doivent comprendre que, en 
forçant le Monténégro par des malversations à intégrer l'Otan, cela ne peut que 
le déstabiliser, encore plus qu'il ne l'est déjà maintenant. Cette méthode 
d'élargissement de l'Otan se situe en dehors de la sphère politique et légale 
et représente une manipulation des institutions et une agression du Monténégro.

La neutralité du Monténégro est la seule issue durable, celle qui peut garantir 
une stabilité à long terme, la prospérité et la paix. Cela vaut pour les 
Balkans dans leur ensemble. La neutralité est une valeur pour laquelle nous 
devons nous battre. Comme le dit Damir Niksic, un intellectuel de Sarajevo, 
nous devons nous battre pour elle comme on se bat pour la forêt vierge 
d'Amazonie.  Se battre pour la neutralité et contre l'Alliance atlantique est 
une question existentielle. Etre ou ne pas être, voilà la question pour le 
Monténégro, pour les Balkans et bien au-delà.

Marko Milacic


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Comment les guerres yougoslaves ont (provisoirement) sauvé l'Otan

En effet, au début des années '90, après la dissolution du Pacte de Varsovie et 
puis de l'URSS, nombreux étaient les analystes et même les hommes politiques 
les plus "main stream" à considérer, comme M. Trump avant son élection, que 
l'Otan était une "organisation obsolète". Mais l'Alliance Atlantique a trouvé 
une nouvelle raison d'être en s'immisçant dans les guerres de l'ex-Yougoslavie, 
d'abord à la demande de l'ONU, puis en s'affranchissant progressivement du 
Conseil de sécurité et des préceptes de base de sa Charte.

Au départ chargée de surveiller l'embargo sur les armes et la "No fly zone" 
décrétée sur le ciel de la Bosnie-Herzégovine (1992), l'Otan s'est imposée 
comme un belligérant dans les conflits yougoslaves: première opération de 
guerre de son histoire en février 1994, première campagne de bombardement en 
septembre 1995, première occupation d'un territoire à partir de décembre 1995, 
la guerre de Bosnie a été celle de toutes les "premières" pour l'Otan. Ce 
n'était qu'un début, car son rôle de pompier-pyromane allait culminer en 1999 
avec près de trois mois de bombardement massif de la Serbie, y compris sa 
province du Kosovo, sous prétexte de sauver sa population albanaise.

En pleine guerre, le sommet de l'OTAN d'avril 1999 à Washington, non seulement 
manifestait son élargissement en direction de la Russie, mais officialisait son 
changement de doctrine, de la défense de ses membres contre l'URSS à un rôle de 
gendarme du monde ignorant les frontières et le droit international.

Georges Berghezan
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