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<http://www.lefigaro.fr/international/2017/06/21/01003-20170621ARTFIG00198-serbie-une-nouvelle-premiere-ministre-lesbienne-et-pro-europeenne.php>
  


Serbie : une première ministre pro-européenne et homosexuelle


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5-6 minutes

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Nommée par le président Vucic jeudi dernier, Ana Brnabic devient, à 41 ans, la 
première femme et la première homosexuelle à prendre la direction d'un 
gouvernement en Serbie. Une décision qui bouscule le paysage politique de ce 
pays conservateur.

Jeune, ouvertement lesbienne, pro-européenne et qui plus est d'origine croate! 
La future première ministre serbe détonne dans un pays traditionaliste, à 
majorité orthodoxe et où les attaques homophobes restent légion. La nomination 
d'Ana Brnabic au poste de première ministre par son «mentor», le président 
Aleksandar Vucic 
<http://www.lefigaro.fr/international/2017/04/02/01003-20170402ARTFIG00129-aleksandar-vucic-ultra-favori-de-la-presidentielle-serbe.php>
 , froisse une large partie de la classe politique. En choisissant cette jeune 
première ministre, l'homme fort de Serbie entend réaffirmer sa ligne 
progressiste et pro-européenne 
<http://www.lefigaro.fr/international/2016/04/22/01003-20160422ARTFIG00295-vucic-l-homme-qui-veut-la-serbie-en-europe.php>
 . Au risque de heurter également la population,.


Une novice politique sous l'aile de Vucic


Née à Belgrade en 1975, Brnabic a fait ses études aux États-Unis et en 
Angleterre avant de revenir travailler en Serbie, d'abord au sein d'ONG 
engagées dans le développement local, avant de prendre la direction d'une 
compagnie de parcs éoliens (continental Wind Serbia). Forte d'un «parcours 
professionnel impeccable», selon les dires de l'ancien premier ministre et 
actuel président serbe, et malgré l'apparition de son nom dans une affaire de 
corruption en 2015, cette jeune femme a fait son entrée en politique il y a 
tout juste un an, en étant nommée ministre de l'Administration de l'État.

Comme lors de cette précédente nomination, sous l'impulsion de Vucic, sa 
désignation au poste convoité de premier ministre n'a pas tardé à soulever une 
vague d'indignation dans la classe politique nationaliste, mais aussi au sein 
de la coalition au pouvoir. Le mouvement nationaliste Nasi a expliqué que Mme 
Brnabic devait sa nomination à son orientation sexuelle et à l'Occident. Dragan 
Markovic, à la tête d'un petit parti pourtant associé à la coalition 
gouvernementale, n'a pas hésité à déclarer, dès jeudi, que «Mme Brnabic ne sera 
pas (sa) première ministre». Le dirigeant de la Serbie Unie lui préférerait «un 
père de famille qui a des enfants».

Brnabic a vite balayé ces attaques en affirmant qu'elle souhaite qu'on la juge 
sur son travail et non sur son orientation sexuelle: «Il s'agit de déclarations 
inadéquates et irresponsables qui sont sans aucun doute discriminatoires». Elle 
n'hésite pas à se revendiquer ouvertement homosexuelle et avait même participé 
à la gay pride de 2016 à Belgrade, manifestation sous haute protection 
policière. Les précédentes éditions avaient été annulées à cause des menaces 
d'attaques du groupuscule fasciste Obraz. En Serbie, où l'église orthodoxe joue 
un rôle important, l'homosexualité est encore vécue comme un problème et les 
attaques restent fréquentes contre cette minorité sexuelle. Légalisée seulement 
depuis 1994, l'homosexualité reste pour certains une «maladie mentale importée 
d'Occident». Le geste du président Vucic est donc d'autant plus fort.


Prendre ses distances avec la Russie de Poutine


À la tête du parti progressiste de Serbie (SNS) majoritaire à l'assemblée et 
omniprésent sur la scène politique nationale depuis les années 2010, Aleksander 
Vucic a été élu au poste honorifique de président en avril dernier 
<http://www.lefigaro.fr/international/2017/04/02/01003-20170402ARTFIG00129-aleksandar-vucic-ultra-favori-de-la-presidentielle-serbe.php>
  dès le premier tour. En nommant Ana Brnabic, il réaffirme son pouvoir et son 
emprise sur le pays, à la barbe des politiciens de sa propre coalition, comme 
le socialiste Ivica Dacic 
<http://www.lefigaro.fr/international/2012/07/26/01003-20120726ARTFIG00644-un-ex-bras-droit-de-milosevic-aux-affaires.php>
 , qui esperaient le poste. Avec un parlement acquis à la majorité 
présidentielle, la confirmation du premier ministre dans les prochains jours ne 
devrait être une formalité. Sans étiquette politique, Ana Brnabic reste sous la 
protection de son mentor politique, comme elle le qualifie.

La promotion de son ancienne ministre est aussi une manière pour Vucic de 
répondre aux critiques concernant le traitement de la communauté LGBT en 
Serbie. Elle lui permet aussi de redorer l'image de son pays vis-à-vis de 
l'Occident, en prenant symboliquement ses distances avec la Russie où la 
situation des homosexuels est peu enviable. Avec ce «pinkwashing» (message 
adressé aux homosexuels), le président serbe réaffirme son orientation 
progressiste, alors que son pays négocie actuellement le chapitre des libertés 
fondamentales et celui du traitement des minorités, dans le cadre de son 
adhésion programmée à l'Union européenne. 
<http://www.lefigaro.fr/international/2016/04/22/01003-20160422ARTFIG00295-vucic-l-homme-qui-veut-la-serbie-en-europe.php>
 

Celle que le président considère comme possédant «les qualités personnelles et 
professionnelles pour exercer ces fonctions» a pour mission de relancer les 
négociations d'adhésion de la Serbie à l'UE. Depuis 2011, ce pays est 
officiellement candidat à rejoindre l'Union. S'affichant comme pro-européenne 
dans un pays ou une majorité de la population est pourtant pro-russe, Mme 
Brnabic a dès sa nomination déclaré son intention de «faire rentrer la Serbie 
dans la famille des États modernes».

http://www.lefigaro.fr/international/2017/06/21/01003-20170621ARTFIG00198-serbie-une-nouvelle-premiere-ministre-lesbienne-et-pro-europeenne.php

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