Chères collègues, chers collègues,

Vous trouverez ci-dessous le programme de la journée d'études *"Sciences
sociales et philosophies transcendantales" *qui aura lieu à l'ENS de Lyon
site Descartes (Bat D4 (recherche) - 2e étage), les jeudi 7 et vendredi 8
février 2019.

En espérant vous y retrouver nombreuses et nombreux,

Bien cordialement,

Les organisateurs : Michaël Crevoisier, Claude Gautier, Laurent Perreau et
Élie Piot

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Journée d'études
*« Sciences sociales et philosophies transcendantales »*
Jeudi 7 février et vendredi 8 février 2019 - ENS de Lyon
Avec le soutien du Laboratoire Triangle (UMR 5206) et du Laboratoire
Logiques de l'Agir (EA 2274)


*Programme du jeudi 7 février*, salle D4-024 :
14h : Accueil des participants et présentation (Claude Gautier, Michaël
Crevoisier)
14h15-15h30 : Luca Scarantino (Université IULM, Milan) : "L'illusoire
existence des faits". Répondant : Laurent Perreau.
15h30-15h45 : Pause
16h00-17h15 : Florence Hulak (Université de Paris VIII, CRESPPA) : "L'idée
d'Histoire, condition a priori de la connaissance historique ?". Répondant
: Michaël Crevoisier.

*Programme du vendredi 8 février,* salle D4-260 :
9h30-10h45 : Michaël Crevoisier (Université de Bourgogne Franche-Comté,
Logiques de l'Agir) : "Le problème des conditions sociales de possibilité
de la pensée philosophique" . Répondant : Elie Piot.
1Oh45-11h00 : Pause
11h00-12h15 : Laurent Perreau (Université de Bourgogne Franche-Comté,
Logiques de l'Agir) : "Le champ comme transcendantal historique chez
Bourdieu". Répondant : Claude Gautier.


*Argument de la journée d'études*

L’objectif de cette journée d'études est de reconsidérer les relations qui
existent entre les sciences sociales et la question, proprement
philosophique, du transcendantal.

On partira de cette première hypothèse de travail : le terme «
transcendantal » se dit en plusieurs sens. En un premier sens,
méthodologique, il désigne la démarche réflexive qui identifie les
conditions de possibilité de la connaissance depuis les structures a priori
de la subjectivité. En un second sens, que l’on pourra dire « logique », le
transcendantal désigne les structures mêmes de la subjectivité, et tout
particulièrement les concepts et les catégories qui rendent l’expérience
possible. Enfin, en un dernier sens, ontologique, le transcendantal peut
désigner un ensemble de possibilités irréductibles à toute objectivation ou
réalité. Cette diversité de significations fait toute la complexité et
toute la richesse de ce que l’on peut appeler la « question » du
transcendantal

On soutiendra également, en guise de seconde hypothèse de travail, qu’au
moins quatre types de rapport peuvent être envisagés entre le projet
philosophique impliqué par le terme « transcendantal » et les sciences
sociales.
1. Dans son acception forte, le projet de la philosophie transcendantale
vise, depuis Kant, à réfléchir les conditions de possibilité de
l'expérience, conçues comme fondement a priori (c'est-à-dire précédant en
droit l'expérience) de la connaissance scientifique. Le questionnement
transcendantal serait donc un préalable à tout jugement scientifique
rigoureux et engagerait la philosophie dans un rapport de fondation
gnoséologique avec les sciences sociales. Or, la science du fait social ou
historique vise, précisément, à mettre au jour le fondement positif ou
empirique de la genèse des pratiques, mais aussi de la pensée en général.
Autrement dit, du point de vue de la fondation, le problème consiste à se
demander dans quelle mesure la réflexion transcendantale peut ressaisir le
conditionnement social ou historique de son exercice. La radicalité de ce
type de questionnement risque de réduire le rapport entre philosophie
transcendantale et sciences sociales à une antinomie constituée d'un côté
par un transcendantalisme défendant une réflexion pure, et de l'autre par
un sociologisme affirmant la réalité sociale comme origine de la
constitution de l'esprit individuel.
    2. Il est aussi possible de comprendre cette opposition du point de vue
du statut épistémologique de l'a priori. En ce sens, le projet de la
philosophie transcendantale consiste à identifier des conditions a priori,
irréductibles à la réalité mondaine, qui pourront servir de critères pour
juger de la validité des énoncés scientifiques : exemplairement, chez Kant,
il s’agit ainsi de juger les énoncés scientifiques en les ramenant aux
conditions a priori de la synthèse des représentations. Cette fonction
critique de la méthode transcendantale s'exerce, entre autres, envers le
naturalisme spontané des sciences sociales. Or, à l'inverse, la mise en
évidence des faits sociaux amène les sciences sociales à produire des
textes méta-théoriques critiques envers les présupposés d'ordre
métaphysique qui rendent le philosophe aveugle à sa propre inscription dans
la société. Ce rapport critique consiste donc en un double mouvement
antagoniste de « sociologisation » du transcendantal visant à retrouver les
structures a priori dans les réalités sociales positives, historiquement
constituées, et de « transcendantalisation » des sciences sociales où la
philosophie continue d'interroger ce qui rend possible, par exemple,
l'intersubjectivité ou l'historicité.
    3. Selon un usage davantage méthodologique de l'a priori, il s'agit
d'interroger la dimension transcendantale, explicite ou non, de la méthode
consistant à rendre raison de l'expérience sociale en identifiant ses
conditions de possibilité. Dans ce cas, le transcendantal se confond avec
l’a priori et désigne un ensemble de catégories qui ont pour principale
fonction de proposer un appareil conceptuel à visée classificatoire.
L'objectif est d'avoir à disposition des outils d'analyse ordonnés
logiquement pour expliquer la possibilité des faits sociaux et l'expérience
qui peut en être faite. Par là, l'ambition méthodologique peut atteindre
l'unification des sciences sociales en une même axiomatique. En ce sens, la
dimension transcendantale de cette approche correspond moins au projet
gnoséologique de la philosophie transcendantale, qu'en une certaine
attitude réflexive de l'observateur qui cherche à ramener sur un même plan
d'analyse les conditions du fait qu'il observe et celles de sa propre
observation. Serait dit « transcendantal », ce type de réflexion
méthodologique de l'observateur dont la prise de distance d'avec
l'expérience sociale qu'il analyse ne le conduit pas à identifier des
principes d'explication transcendants, mais le ramène aux conditions
immanentes, sociales ou historiques, de sa propre expérience en tant
qu'observateur.
    4. Enfin, puisque les découvertes des sciences sociales soulèvent
nécessairement des problèmes d'ordre philosophique, le concept de
transcendantal peut aussi entrer en un rapport problématique avec ces
nouvelles connaissances. La philosophie transcendantale est amenée à
réinterroger le bien-fondé de ses concepts et de ses manières de
questionner. En retour, les praticiens des sciences sociales doivent
développer leurs propres outils pour rendre raison des faits qu'ils
établissent. Selon ce double rapport problématique, le concept de
transcendantal est amené à se transformer, et d’autres concepts peuvent se
substituer à lui. Ainsi il est possible de l'interroger au sein d'une série
d'autres termes : la structure, le champ, le symbolique, le
quasi-transcendantal, l'empirico-transcendantal qui sont peut-être autant
de moyens de penser autrement, mais non sans en hériter, la dimension
transcendantale de la réflexion qui naît de la confrontation aux phénomènes
sociaux.

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Michaël Crevoisier
Doctorant (école doctorale SEPT UBFC / Laboratoire des Logiques de l'agir)
Chargé de cours (Université de Franche-Comté)

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Pour toute question, la FAQ de la liste se trouve ici:  
https://www.vidal-rosset.net/
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        
        

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