Bonsoir ! J'ai reçu beaucoup de mal de votre part et je vous remercie vivement du soutient apporté.
On m'a posé plusieurs questions auxquelles je vais plutôt répondre ici, afin que tout le monde en profite. Désolé pour le pavé. *** On m'a demandé si j'avais un programme, et le fait est que je n'ai pas à en avoir. Un membre du collège n'a pas, me semble-t-il, le pouvoir d'initiative, en tout cas pas seul. Cependant il y a des tas de sujets qui m'intéressent, en voici quelques uns : * Bitstream FTTH Le régulateur parle de protection et encouragement des investissements des opérateurs d'infrastructures (publics et privés). J'ai toujours trouvé ça idiot, pour plein de raisons : - La rentabilité d'un réseau, c'est nombre de prise active * ARPU / coût du déploiement. Donc plus il y a de prises vendues, y compris par un opérateur de service concurrent à celui verticalement intégré à l'opérateur d'infrastructure, mieux c'est pour tout le monde. - Faute de bitstream, des opérateurs d'infrastructure concurrents doivent déployer plusieurs infrastructures en redondance, ce qui est plus coûteux tant sur le plan économique que sur le plan environnemental. - La taille réduite des points de mutualisation et leur dispersion géographique fait qu'il faut entre 15 et 25% de parts de marché _par zone_ pour que chaque zone soit à peu près rentable (aux tarifs retail). Ça limite mécaniquement le marché à 5 - peut être 6 - opérateurs à l'échelle nationale, c'est pas de nature à plaire à l'autorité de la concurrence et ça interdit l'émergence d'un nouvel acteur qui pourrait se démarquer par des offres plus appréciées des utilisateurs finals. - Impossible d'établir une couverture nationale même pour les opérateurs locaux qui auraient pu tenter de dégrouper les PMZ de leur territoire, mais qui ont souvent des clients ayant des antennes un peu partout - Impossibilité technique (taille et conception des PMI) et économique (coût par bâtiment + coûts administratifs pour établir la base de contacts) de déployer avec la capillarité suffisante pour reproduire une offre de marché en ZTD. Donc, l'absence de bitstream freine la transition vers la fibre, verrouille le marché à un nombre réduit d'acteurs, donc nuit à l'innovation, à l'économie et à l'efficacité d'investissement des opérateurs d'infras. On a vu arriver des offres bitstream FTTH "pro" non régulées, avec des tarifs qui ne permettent pas de répliquer les offres de marché B2C, donc un dommage de plus pour les utilisateurs de ces offres (particuliers, collectivités, TPE et PME) qui perdent la possibilité de passer à la fibre avec leur opérateur ADSL actuel s'il n'est pas du cartel. Donc, tant qu'on ne me donne pas une bonne raison de maintenir la position actuelle de l'ARCEP, je l'inviterai à considérer la régulation d'offres bitstream pour *tous* les opérateurs d'infrastructure présents en PMZ et PMI. Pas d'attaque ciblée donc, comme pouvait le suggérer ma formulation initiale sur la liste : c'est vraiment d'une nécessité pour le marché et les utilisateurs dont je parle. * Statut d'opérateur "Communications Électroniques", ça veut pas juste dire téléphone, ça inclus aussi tout moyen de communiquer entre utilisateurs (sauf la publication, c'est un autre sujet). Donc tout système de communication vocal, textuel ou visuel *est* un service de communication électronique, et son éditeur doit être traité comme un opérateur de tel réseau. Ça implique notamment deux conséquences : - Les communications / correspondances sont *privées* - Les autorités doivent pouvoir les intercepter sur décision de justice ou services de renseignement après validation par la CNCTR, sans pour autant pouvoir exiger leur déchiffrement éventuel si celui ci est contrôlé par l'utilisateur. En clair : non, google ne peut pas lire vos mails, même avec un robot, et encore moins y donner accès à des chercheurs. Non, Facebook ne peut pas vendre le contenu de vos messages privés ou le fruit de quelque traitement appliqué dessus. Et non, Microsoft / Skype ne peut pas se débiner quand on lui demande de l’interception légale. Et s'ils le font, les sanctions peuvent être lourdes. Ça pose AUSSI un problème amusant de territorialité du droit : CLOUD Act et la section 215 du patriot act, qui s'appliquent à tous les géants US mais aussi normalement à OVH depuis qu'il s'y est installé, et ce même pour les serveurs situés en Europe, permet il de protéger le secret des correspondances, ou est ce qu'on a pas un GROS problème à régler ? * Les terminaux Là c'est un sujet un peu touchy que j'ai encore peu travaillé sur le plan juridique, et qui concerne en partie plus la CNIL que l'ARCEP. Et l'ANSSI, éventuellement. La question est par exemple de savoir si l'éditeur du logiciel inamovible d'un terminal à le droit d'utiliser sans son consentement et à son insu, la connexion de l'utilisateur, ce qu'il se passe mécaniquement quand Android remonte la localisation en continu. Il y a aussi une notion de sécurité du terminal d'un réseau d'opérateur : l'opacité des systèmes actuels (baseband, OS et userland) permettent ils de les contrôler, surtout quand on voit la faible durée de support et la lenteur de publication des mises-à-jours ? Enfin il y a la question de neutralité du Net qui se pose lorsque l'éditeur ou fabricant contrôle tellement le terminal que l'utilisateur en perd sa capacité à utiliser certains services, ou à l'inverse, à en supprimer certains qu'il ne désire pas voir tourner à son insu. * Les fourreaux Gros sujet que j'ai déjà abordé ici, mais qui n'est toujours pas réglé. Il y a semble-t-il un vide juridique important concernant la propriété des infrastructures d'accueil et des problèmes d'application du droit en vigueur. Sur ce point, j'aimerais boucher les trous en travaillant notamment avec les collectivités territoriales et le législateur sur : - Une proposition de loi pour combler les quelques vides et inconnues (du genre : propriété de l'infra après expiration d'une permission de voirie…) - une plate-forme technique permettant d'assurer une meilleure connaissance du réseau, son entretient, la perception de toutes les redevances ou loyers dûs par les opérateurs, voire la commercialisation de ces infras. Plein d'autres fonctions sont envisageables, et ça abonderait surtout aux budgets des collectivités territoriales, donc au contribuable et utilisateur final. * Les hébergeurs Alors ça va peut être faire râler certains d'entre vous, mais j'ai l'intuition que louer un serveur dédié, c'est un bundle entre une machine, de l'énergie et une connectivité. Et donc un service de communication électronique ouvert au public. Donc que les hébergeurs sont de fait aussi opérateurs. Ça devrait pouvoir être clarifié. *** Vous m'avez demandé le modèle de courrier, et pour la plupart en avez repris mot pour mot la formulation de certains paragraphes. Ça s'est vu. La structure qui me semble pertinente est la suivante : - "Monsieur le Président [de la République|du Sénat]," - "Je vous écris en tant que…" présentez vous, votre qualité, vos intérêts et préoccupations - Contexte : nomination à venir d'un membre du collège de l'ARCEP - Option : c'est ptet urgent, vu les dates de fin de mandats et les vœux de l'autorité programmés pour le 31 - "Vous avez reçu la candidature de mon confrère Jérôme Nicolle" (pommade optionnelle) "que je soutien parce que…" - Formule de politesse avec la demande, genre "Je sollicite de votre bienveillance de faire droit à cette nomination…" - "Respectueusement," ou tout autre clôture *** Pour ceux d'entre vous que je n'ai pas encore le plaisir de connaître, j'aurais du me présenter. Autodidacte, presque 36 ans, 15 ans de réseaux dans les pattes, "de la tranchée au routeur" en passant par pas mal de sujets connexes et transverses. J'ai surtout travaillé en prestation / freelance, dont pour pas mal d'acteurs présents ici, et même des très gros, presque toujours en France. Je touche à de nombreux sujets, et suis plutôt recommandé pour des sujets de conception et construction de réseaux optiques, IP/MPLS, plutôt service provider, parfois entreprise. -- Jérôme Nicolle +33 6 19 31 27 14 --------------------------- Liste de diffusion du FRnOG http://www.frnog.org/