J'avoue être tombé de ma chaise en voyant que Darodes était le favoris...

Le 09/10/2020 à 15:23, Jérôme Nicolle a écrit :
> Pour ceux qui - comme moi - n'aiment pas ce genre de site - mais bon là
> pas trop le choix, voici le texte du manifeste :
>
> «Les Numéristes Atterrés» est un collectif de professionnels du
> numérique et des télécommunications, ingénieurs pour la plupart. Nous
> voulons améliorer le cours des discussions et décisions de notre secteur.
>
> Après une séquence médiatique calamiteuse de presque cinq semaine autour
> de la 5G, vient l'annonce [0][1] stupéfiante du successeur probable de
> l'actuel président de l'ARCEP, le régulateur de notre secteur. Cette
> nomination digne de l'Ancien régime [2], si elle vient à se réaliser,
> illustre le grave problème de gouvernance du secteur des télécoms en
> France et l'entre-soi qui prévaut dans les nominations au Collège du
> régulateur, un système dont les citoyens et les entreprises de notre
> pays font hélas les frais depuis l'ouverture du marché à la concurrence.
>
> Comment est-il possible que le numérique, à travers la 5G, inquiète
> soudain nos concitoyens à ce point ? Notre pays d'ingénieurs et
> inventeurs n'est-il pas réputé pour sa curiosité en matière
> d'innovations technologiques ? Les potentialités de la 5G n'ont-elles
> pas convaincu la plupart des pays émergents, continent africain en tête,
> que cette technologie offre l'opportunité de maîtriser avant nous une
> possible quatrième révolution industrielle ? Le régulateur sectoriel,
> qui attribue les fréquences mobiles pour le compte de l'État, n'était-il
> pas le mieux placé pour anticiper et documenter ce débat, réduit
> aujourd'hui en France à des échanges irrationnels dans un contexte
> sanitaire déjà anxiogène ?
>
> Comment est-il possible que la nomination du président de l'ARCEP,
> principal régulateur du numérique - c'est à dire de la grande force de
> transformation du monde - se prépare dans le secret des cabinets
> ministériels sans que le secteur et les représentants élus des Français
> n'aient pu exprimer leur appréciation de son action passée et leurs
> attentes et exigences pour l'avenir ? Ne venons-nous pas de vivre le
> premier confinement planétaire de l'histoire de l'humanité et
> n'avons-nous pas mesuré, à cette occasion, à quel point l'accès
> numérique était essentiel pour travailler à distance et communiquer avec
> ses proches ? N'avons-nous pas été stupéfaits par ces images d'étudiants
> de communes rurales, dans l'incapacité de suivre leurs cours de chez eux
> faute d'accès internet, 23 ans après le début du déploiement de l'ADSL,
> et malgré la « Mission Très Haut Débit » [3] ? N'est-il pas temps de
> faire le bilan de 23 ans d'action du régulateur et d'en tirer des
> enseignements ?
>
> Nous, techniciens, ingénieurs, chercheurs, enseignants, tous
> professionnels du numérique, souhaitons que des sujets aussi cruciaux
> pour l'emploi, la santé, l'éducation, etc. que l'aménagement numérique
> du territoire ne soient plus laissés entre les seules mains de hauts
> fonctionnaires issus des Grands Corps de l'État. Leurs formations sont
> certes prestigieuses, mais ils n'ont ni expérience concrète des réseaux,
> ni expérience de l'entreprise, ni empathie pour les territoires ruraux,
> ni vision sur la place de la France et de l'Europe dans un univers
> numérique pourtant en expansion.
>
> Les professionnels du secteur savent bien que le dogme de la concurrence
> par les infrastructures choisi par le régulateur depuis sa création est
> une interprétation dévoyée des directives européennes. Ce choix,
> totalement inadapté à la géographie de la France, a conduit les
> opérateurs à déployer des réseaux redondants. Cette duplication a réduit
> leur capacité collective à mieux couvrir le territoire national,
> Outre-mer compris, mais aussi l'efficacité énergétique, économique et
> environnementale des services de communications électroniques.
>
> Les conséquences du dogmatisme du régulateur sont connues et
> mériteraient une mission d'évaluation de la Cour des Comptes : côté
> réseaux mobiles, quatre réseaux d'antennes dans les zones où les
> opérateurs ont estimé leurs investissements rentables, et à l'inverse
> une couverture mobile toujours déficiente dans des milliers de communes
> rurales malgré un coûteux programme correctif perpétué par les
> gouvernements successifs depuis 15 ans et dont le « New Deal Mobile »
> est le dernier avatar ; côté réseaux fixes, une initiative pertinente du
> gouvernement en 2010 d'équiper notre pays d'un réseau de fibre optique
> pour remplacer le vieux réseau téléphonique en cuivre, en y consacrant 2
> Mds€ du Grand Emprunt et en s'appuyant enfin sur l'intelligence
> territoriale sur le numérique... Réseau dont malheureusement la partie
> mutualisée est très réduite en raison des décisions du régulateur ;
> réseau de toute évidence extrêmement fragile et vulnérable en raison des
> choix d'architecture faits par l'Agence nationale mise en place pour
> piloter ce grand investissement d'avenir et par le régulateur : armoires
> éventrées, lignes coupées par les sous-traitants des opérateurs,
> nécessitant des interventions à répétition !
>
> Pourquoi tant de si mauvais choix ? N'aurions-nous pas pu faire mieux
> dans le temps imparti et avec des moyens identiques ? Les attributions
> de fréquences par le régulateur ces 10 dernières années ne
> pouvaient-elles pas être assorties, comme ailleurs en Europe et dans le
> monde, d'objectifs plus ambitieux de couverture territoriale et de
> mutualisation afin de sortir enfin de cette stratégie corrective
> ruineuse et inefficace ? Le nouveau grand réseau de fibres optiques sur
> lequel va s'appuyer notre compétitivité au 21ème siècle ne devrait-il
> pas être un démonstrateur du savoir-faire de toute la filière qui y
> contribue et du talent des ingénieurs français ? In fine, le Collège de
> l'ARCEP et sa direction générale, organes de décision du régulateur,
> ainsi que l'Agence nationale chargée de piloter ce chantier à 30 Mds€,
> ont-ils été dotés des compétences, du mandat, de la sensibilité
> territoriale et de la vision requis, s'agissant de missions ayant un tel
> impact sur la société et sur l'économie ?
>
> Le moment est venu de poser ces questions et, à la veille d'une
> nomination très importante, d'alerter les Français, leurs représentants
> élus et le gouvernement.
>
> Nous appelons à ce que le processus de nomination au Collège de l'ARCEP
> soit revu à l'aube de cette ère inconnue, où la concomitance de trois
> crises (sanitaire, économique et environnementale) rebat les cartes.
>
> Nous demandons que soient considérés des candidats respectueux de toutes
> les parties prenantes, y compris des ingénieurs qui font fonctionner ces
> réseaux et dont les points de vue sont par nature rationnels et
> scientifiques.
>
> Nous demandons que l'avis du Parlement sur la nomination du président de
> l'ARCEP ne soit pas une simple formalité et qu'à travers les auditions
> des candidats - et pas seulement du candidat poussé par le système - les
> représentants élus des Français puissent apprécier leur capacité et leur
> détermination à servir réellement l'intérêt général.
>
> Nous souhaitons que le Parlement et les collectivités territoriales
> soient plus impliqués dans les travaux de l'ARCEP, dont la mission
> devrait être non seulement de réguler le secteur, mais aussi d'éclairer
> les choix politiques de l'exécutif et du législateur et de servir
> l'intérêt de tous les acteurs économiques. Pas uniquement celui des
> grands opérateurs actuels. Nous demandons que tous les acteurs
> économiques usagers du numérique soient plus écoutés. Nous espérons que
> le prochain président de l'ARCEP aura la capacité à faire collaborer
> l'ensemble de ces forces vives pour proposer à sa tutelle une stratégie
> gagnante pour le pays face aux grandes échéances numériques de la décennie.
>
> Nous, Numéristes Atterrés - atterrés cette fois par des pratiques d'un
> autre âge pour nommer le titulaire d'une fonction aussi stratégique pour
> l'avenir de notre pays - alertons le gouvernement sur les enjeux de
> cette nomination dans un moment si particulier de notre histoire
> collective. Un moment où les Français vont devenir de plus en plus
> attentifs à l'exemplarité de l'État.
>
> [0] https://reflets.info/articles/antoine-darodes-futur-president-de-l-arcep
> [1]
> https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/quatre-candidats-a-la-presidence-de-l-autorite-des-telecoms-20200928
> [2]
> https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000039247362/2019-10-20
> [3] https://www.gouvernement.fr/action/le-plan-france-tres-haut-debit
>
>
> Manifeste coécrit par :
>     - Jérôme Nicolle, consultant indépendant en infrastructures numériques
>     - Pierre Beyssac, ingénieur, entrepreneur
>     - Quentin Adam, Président fondateur de Clever Cloud
>     - François Lacombe, ingénieur
>


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Liste de diffusion du FRnOG
http://www.frnog.org/

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