Le 27/08/2023 à 07:39, Raphaël Jacquot a écrit :
Raphaël
qui est confronté régulièrement à la foudre dans les montagnes, mais qui a rarement perdu du matériel...

Les liaisons cuivre souterraines entre bâtiments, ce sont effectivement des points d'entrée de choix pour les ondes de courant en cas d'impact de foudre à proximité. Et ce, plus particulièrement en courant faible, car les circuits électroniques ne sont pas prévus pour encaisser de tels chocs d'une part, et pas grand monde ne pense à les protéger correctement d'autre part :-)

Alors, certes, cela ne répond pas au message initial, qui concerne plus l'aspect diagnostic / curatif. Mais en préventif, pour la prochaine fois, voici un certain nombre de bonnes pratiques à mettre en oeuvre : - Beaucoup de gens pensent à protéger les arrivées EDF, mais ne pensent pas toujours aux courants faibles : réseau inter-bâtiments, alarmes, caméras, ADSL... Il faut protéger *toutes* les entrées filaires d'un bâtiment, sans exception. Et ce d'autant plus que le bâtiment est isolé / éloigné de tout autre bloc de constructions. - Pour les liaisons inter-bâtiments, déjà, éviter le cuivre ! Même sur des courtes distances de 20m-50m, mettre de la fibre. C'est un isolant naturel :-) - Souvent, les installateurs d'alarme ou vidéosurveillance ont tendance à faire leurs propres installations et leurs propres câblages sans forcément tenir compte de l'existant ni des recommandations. Aujourd'hui, tout fonctionne en IP. Donc, s'il n'est pas possible de modifier leur câblage, les laisser mettre leur équipement dans un coin à part, si possible en limite de bâtiment, et isoler leur interface Ethernet du reste du  réseau par une longueur de fibre. - S'il n'est vraiment pas possible de mettre un bout de fibre, et que le cuivre reste obligatoire, maximiser les protections : parasurtenseur courant faible adapté (il en existe pour Ethernet, xDSL et tous types de liaisons filaires série). Eventuellement, mettre un petit switch premier prix en "tampon" avant le switch qui coûte un bras et un rein. - Et, bien entendu, respecter les règles de base en matière de protection contre les surtensions : installation de terre fiable, cables de terre les plus gros et les plus courts possibles, connecter tous les chassis métalliques à la terre (la baie, les bandeaux RJ) et entre eux par des liaisons équipotentielles. Idéalement, à faite surtout sur les équipements de périmètre les plus exposés, connecter les coffrets de chacun des équipements (switches, routeurs, modems...) à la terre : derrière les boîtiers, il y a en général une petite vis avec un sigle de terre; c'est à cela que çà sert :-) - Sur les installations professionnelles en points hauts, tous les bâtiments sont cerclés avec des feuillards de mise à la terre de forte section, afin de constituer une sorte de "cage de Faraday" (même si ce n'est pas l'étanchéité aux ondes électromagnétiques qui est recherchée ici). Toutes les pénétrations de bâtiments sont également protégées (les blindages des câbles sont mis à la terre). Cà permet de constituer une grosse "boite métallique équipotentielle" à travers laquelle l'onde de choc peut passer, mais pas entrer.

Enfin, quelques remarques plus théoriques :

L'idée, c'est qu'en cas d'impact de foudre a proximité, une onde de courant de très forte intensité est générée en un temps très bref. Elle cherche à s'évacuer, depuis le point d'impact vers le reste de la terre. Si, sur son chemin, elle rencontre un câble électrique, le cuivre étant un conducteur de choix bien meilleur que le sol terrestre, elle va l'emprunter en priorité, et se propager à travers lui. Elle va ainsi arriver sur l'équipement de terminaison (modem, port de switch, centrale d'alarme, ...). Là, plusieurs choses peuvent se passer : - S'il y a un parasurtenseur : celui-ci va "évacuer" tout ou partie de l'onde vers la terre, en fonction d'une part de sa capacité (en schématisant, un parasurtenseur de 5 kA évacuera bien un courant induit de 1 kA, mais absolument pas un impact direct de 100 kA), et d'autre part de la longueur du fil de terre (si c'est le conducteur de terre 2.5mm2 d'une prise de courant ordinaire, qui rejoint un TGBT situé à l'autre bout du bâtiment à plus de 100m de distance, il est probable qu'elle trouve un chemin plus court pour s'évacuer, par exemple en "arquant" vers un équipement très cher situé juste à côté). D'où l'idée de la mise à la terre des parasurtenseurs par des câbles les plus gros et les plus courts possible, afin que la surtension soit tentée de suivre ce chemin-là plutôt qu'un autre. - S'il n'y a pas de parasurtenseur, la surtension va entrer dans l'appareil, et tenter d'en sortir par où elle peut, par exemple en créant un arc entre un composant électronique et le boitier métallique (d'où l'intérêt, ici encore, de relier les coffrets à la terre) - Si elle n'est toujours pas évacuée, la surtension va continuer son chemin, en ressortant par tous les autres câbles disponibles, et en se propageant ainsi d'appareil en appareil jusqu'à ce qu'elle soit complètement atténuée. Donc, plus il y a de protections / d'obstacles à sa progression, et plus vite l'onde de choc s'annulera. A l'inverse, moins il y a de protections, et plus l'onde de choc détruira d'appareils sur son passage... - L'onde de choc, c'est un courant, qui se chiffre en dizaines ou centaines de kilo-ampères, et qui doit s'évacuer. Sur son passage, si elle rencontre deux appareils séparés par une résistance électrique R, une tension électrique apparaît entre les deux, sa valeur est donnée par la loi d'Ohm U=RI. Donc, même sur un conducteur électrique de résistance 1 ohm, 10 kA font naître une tension de 10 kV. Si l'isolant n'est pas suffisant, il peut y avoir création d'un arc électrique destructeur. Le concept de l'équipotentielle, c'est de relier entre eux tous les chassis et toutes les masses de tous les équipements par des câbles les plus courts et les plus gros possibles (donc, avec la résistance électrique la plus faible). Ainsi, quand une onde de choc "traverse" l'installation, le potentiel de toute l'installation peut s'élever à des valeurs très importantes, mais si la résistance entre les appareils est faible, la différence de potentiel entre les appareils sera faible, et donc, çà ne claquera pas). C'est un peu comme des pigeons posés sur une ligne haute tension : ils sont tous au potentiel de 20 kV, mais comme il n'y a pas de "différence de potentiel" entre eux, il ne se passe rien. Si, en revanche, ce sont deux cigognes, sur deux câbles différents, et que leurs ailes se touchent...

Avec le respect de bonnes pratiques simples, on peut s'affranchir de 95% des problèmes concernant les impacts de foudre dans le voisinage. Cependant, si le site est exposé (rase campagne, point haut, nature géologique du sol) et fait souvent l'objet d'impacts de foudre à proximité, il y a lieu de s'adresser à des spécialistes qui réaliseront une étude adaptée. Par exemple, il sera possible d'installer un paratonnerre (une pointe en fer placée en hauteur pour tenter de "canaliser" la foudre, et espérer qu'elle tombe à cet endroit et pas ailleurs). Mais dans ce cas, en cas d'impact, une onde de choc induite va traverser tout le bâtiment, donc il est indispensable que toute l'installation à l'intérieur soit bien réalisée et bien protégée.




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