Bonjour, (attention, c'est long)
Le vendredi 18 mars 2011 à 13:30 +0100, Frédéric VANNIÈRE a écrit : > Dans les deux cas on nous parle de serveurs dédiés écolo-vert-green > alors qu'un serveur dédié est intrinsèquement non écologique. C'est > pareil pour les voitures, une voiture électrique ne sera jamais > écologique. C'est une affirmation grave ce que tu sors là. Ca mérite d'être développé. De ton point de vue, un véhicule individuel n'est écolo que s'il est mutualisé, et donc n'est plus ? N'est ce pas une position légèrement extrémiste ? > L'hébergement réellement écologique c'est le mutualisé Le principe susceptible de rentre le mutualisé plus économique est le phénomène naturel de contention, c'est à dire de l'alternance d'usage des ressources entre ses usagers, tendant à mieux utiliser chaque ressource donc l'empreinte écologique n'est pas directement proportionnelle à l'usage (conso idle + variable à tendance logarithmique en foinction de l'usage). On est bien d'accord là dessus ? Le problème, c'est la "marge de sécurité". Pour qu'une infrastructure mutualisée offre les mêmes garanties de disponibilité et de performance qu'une infrastructure dédiée bien dimensionnée, il faut la sur-dimensionner et donc réduire le bénéfice obtenu par la contention naturelle. Tu te retrouves donc nécessairement à devoir choisir entre la qualité d'expérience et ta conscience écologique. > Donc, OVH, Ikoula et les autres, si vous voulez vraiment faire de > l'écologique, proposez de l'hébergement mutualisé qui tienne vraiment > la route et réservez les serveurs dédiés aux clients qui en ont vraiment > besoin. Et c'est là le non sens de ta proposition : "faites en sorte que le mutualisé gaspille plus de ressource, ce sera plus écologique que de fournir des briques d'infras potentiellement bien dimensionnées et gérées par leurs utilisateurs". En proposant ça : - Soit tu obtient l'effet inverse à la position que tu défends - Soit tu part du principe que personne n'exploite correctement les dédiés, et donc que les sysadmins clients d'OVH et d'Ikoula sont majoritairement des brelles... C'est toi qui vois hein, mais je préfèrerais d'autres approches _un peu plus abouties_ dans l'étude de ce problème. > ce que les marketeux appelle "bidule Cloud tralala" c'est d'une > certain façon du mutu pour pro ? Tout à fait ! Avec une nuance quand même. Le cloud, sous sa forme "virtualisation", c'est avant tout un moyen de réserver de la ressource sur une infrastructure physique mutualisée. Si on sur-dimensionne les réservations ou qu'on ne ré-alloue pas dynamiquement le hardware, par exemple en l'éteignant quand on a pas besoin de ces ressources, ça ne sert à rien, des petits dédiés indépendants auraient pu faire le même travail. Au contraire même, entre les pertes de ressources dues à la couche de virtualisation et à une certaine immaturité des technos (les latences sur iSCSI n'ont quand même rien à voir avec ce que tu peux avoir sur un vrai disque : moins d'IOPS par noeud = plus de noeuds, donc plus d'énergie, et ça croit de façon exponentiel puisque l'ajout d'un noeud charge plus les flux protocolaires nécessaires au clustering et à la cohérence entre les noeuds). Le cloud, plus que les offres mutualisées classiques, implique donc un gaspillage de ressources. Seulement comme le taux de perte est très variable en fonction des applications, je n'ai pas l'impression qu'on aie une seule étude sérieuse sur l'impact de cette approche. Et comme ça démontrerait l'hypocrisie du bullshito-marketting autour du cloud, personne ne financera une étude neutre de toute façon. > Après, sur l'initiative d'OVH (dont je suis aussi client satisfait), > c'est tjs mieux que rien > que d'installer 10MW d'éoliennes, non ? Pareil pour le transport, je > prefere la péniche > au semi ! +1 pour le transport fluvial, c'est efficace et réellement positif en terme de bilan écologique. Par contre pour les éoliennes, j'ai un peu de mal, parce que là encore je ne trouves pas d'étude sérieuse qui prenne en compte : - La fabrication de l'éolienne, incluant la cuisson des composites - L'impact sur la faune des implantations plus ou moins sauvages, dont les études d'impact sont quand même très souvent bidonnées - La perte en transport d'énergie due à la dispersion des éoliennes et à leur implantation trop lointaine des pôles de consommation Du coup, pour moi, voir des gens s'exciter sur les éoliennes, ça me fait la même impression que ces moulins : ils brassent du vent. > niveau trollage du dredi, la vrai prochaine étape pour rendre > l'utilisation des serveurs plus vert, > c'est d'abord et avant tout de développer les soft pour qu'ils > consomment le moins possible > (moins de ressources, moins de cpu, moins de chaleur, moins > d'usure ... ==> moins d'edf, moins de renouvellement de parc, ... ;) CA c'est la remarque la plus sensée du thread. Évidemment, prendre le problème à la racine est TOUJOURS la meilleure solution. Ne pas consommer des ressources dont on pourrait se passer, c'est le bon sens même. Seulement, et on en a déjà parlé ici même il y a quelques mois, ça demanderait trop de ressources humaines compétentes et intelligentes, capables d'utiliser les bons outils et algorithmes pour les bonnes tâches, évitant les couches d'abstraction si pratiques lorsqu'on développe de l'applicatif, faisant donc grimper en flèche le CAPEX d'un projet de SI pour un gain en OPEX qui n'a pas encore été correctement évalué par des études neutres. Tu serais prêt à faire se pari et à chercher l'optimisation maximale dans tous tes projets ? Bien ! Formidable ! Mais personne ne te suivra... > On va vraiment devoir se passer de la sur-couche JAVA qui bouffe des > ressources pour masquer l'incompétence de quelques devs ? ... Parce que ce n'est pas qu'une question de technologie, c'est aussi une question de marketting. Si la large adoption de Java était motivée par des réalités techniques, on aurant aucun mal à démonter les argumentaires, seulement la force de JAVA n'est pas technique. Octave en parle très bien quand il évoque les nuisances de l'émotionnel dans nos marchés. Les décideurs sont corruptibles à cause du jeu de séduction marketing de quelques avant-ventes, oubliant le pragmatisme technique auxquels ils devraient s'astreindre. Ce phénomène est de plus un cercle vicieux : plus il est adopté, à tort ou à raison, plus il est "reconnu", plus ça semble être un choix pragmatique parce que d'autres ont fait le même, plus il y a de ressources con-pétante sur cette techno, moins le risque est grand pour les primes du décideur en charge. Mais qui osera et pourra casser ce cercle vicieux ? Qui arrivera à ramenner du bon-sens dans les process décisionnels des services IT de nos grandes entreprises ? Qui investira des millions sur la formation des ressources aux bonnes technologies oubliées dans les cursus initiaux ? Qui s'opposera au rouleau compresseur d'un marketing devenu si puissant ? Personne, à priori, car l'émotionnel a trop souvent le dernier mot sur le rationnel. > On va vraiment devoir se passer de la sur-couche JAVA qui bouffe des > ressources pour masquer l'incompétence de quelques devs ? Oui alors la vague ARM, il faut y faire attention : faire tourner du JAVA dessus sera d'une grande inefficacité, par exemple. Utiliser ces architectures à bon escient impose : - De penser des architectures hyper-modulaires - De programmer en bas niveau (pas d'interprété ou de JIT) - De modifier du coup tous les socles technologiques existants Car, tant que tu fais tourner une bouse codée sur du LAMP sur un SoC ARM, tu vas juste avoir une machine qui consomme 3 fois moins qu'un homologue x86, mais pour trois fois moins de puissance applicative. Ou est l'intérêt ?? > je me suis > toujours demandé si on pouvait aller jusqu'à > l'OS, peux t'on dire que linux est plus green > que windows parcequ'il consomme moins de watts ? Question légitime et fort intéressante. Globalement non, en tout cas pas vu l'effet d'échelle, car la gestion d'énergie est bien plus aboutie sur plateforme propriétaire. Par contre, bien utilisée, la modularité d'un système open-source te permet de ne faire tourner QUE ce dont tu as vraiment besoin, donc potentiellement d'économiser certaines ressources. C'était en tout cas vrai jusqu'à l'apparition de Core Server 2008 qui offre aussi beaucoup de souplesse. Alors j'aurais tendance à dire que Microsoft est en avance à ce niveau. > Et l'Iphone, c'est écolo ça ? Totalement ! On a rarement vu un si bon niveau d'intégration du logiciel et du matériel, c'est donc une utilisation optimale de la plate-forme ! C'est l'aspect dramatique de l'abandon du marché serveur par Apple : s'ils avaient envisagé d'appliquer les mêmes recettes au marché qui nous intéresse, ils auraient aussi pu révolutionner nos activités comme ils l'ont fait sur tant d'autres secteurs... > Je pense que la première chose à faire sur ces grosses infra, c'est > d'avoir des arrivées électriques en courant continu avec les bons > voltages vers les serveurs. > 10000 alims pour 10000 serveurs (si ce n'est pas 20000 avec les alims > redondantes) - ça fait une sacré déperdition. > Ce genre de chose est tout à fait envisageable vu l'échelle d'OVH par > exemple (ils ont déjà du matériel custom, pourquoi ne pas pousser plus > loin ?) Détrompe toi, c'est bien moins évident qu'il n'y parait. Je ne connais pas la position d'OVH sur le sujet, mais Arnaud (dedibox) à envisagé cette approche dès 2006 et en a tirer de très bons retours d'expérience : - Distribuer des basses tensions, ça veut dire de plus fort ampérages, donc plus de câbles, plus gros, qui chauffent plus. - Les convertisseurs DC-DC sont fiables, certes, mais coutent cher et nécessitent des composants utilisant des matériaux plus toxiques pour arriver à de bons rendements (condensateurs au tantale, etc...) - Il y a plus de R&D et d'optimisations sur les équipements opérant en AC, donc des effets d'échelle intéressants Mais il sera probablement beaucoup plus exhaustif et précis que moi sur le sujet, comme en atteste sa conférence au dernier FRnOG. > De mémoire, OVH a ce genre de pratique, avec d'autres techniques, pour > diminuer les consos dans leurs DC. > > Je salue en tout cas les efforts de ces deux entreprises (OVH étant > précurseur, notamment au niveau du refroidissement). Justement, ils recherchent, ils investissent, ils expérimentent, et ils trouvent. C'est autrement plus efficace que le pinaillage universitaire... > Mieux vaut de petits gestes, même si il y a du marketing derrière, que > rien du tout comme beaucoup le font. > Sachant que tout ceci coûte en prime moins de sous, pourquoi s'en > priver ? Parce que ce n'est pas applicable dans tous les cas de figure et que ça remet en cause trop d'infrastructure, demanderait trop d'investissement, même s'il est vite récupéré, sans améliorer l'EBITDA des exploitants de datacenters, en tout cas pas assez fortement et rapidement à leur goût... -- Jérôme Nicolle 06 19 31 27 14 --------------------------- Liste de diffusion du FRnOG http://www.frnog.org/