Le 16 janvier 2018 à 15:25, Christian Rogel <
christian.ro...@club-internet.fr> a écrit :

> > Le 16 janv. 2018 à 11:47, Rpnpif <rpn...@trob.eu> a écrit :
> >
> > Le 15 janvier 2018, Philippe Verdy a écrit :
> >> Le français est en fait une langue très récente créée de toute pièce
> (une
> >> des plus récentes en Europe, si on met de côté la création du
> >> "serbo-croate" chapeau sur le modèle du français, aujourd'hui enterré,
> ou
> >> la création encore plus récente du bosno-serbe, du monténégrin et du
> >> bosniaque). Ce qu'on appelle "moyen français" ou "ancien français" est
> un
> >> abus de langage, alors que c'est en fait différentes langues de France
> >> qu'on a ensuite tenté de ridiculiser et faire oublier leur histoire en
> en
> >> faisant des "dialectes" du français alors que le "français" n'est qu'un
> >> dialecte inventé pour s'imposer contre ces langues.
> >
> > Merci Philippe de cette précision rarement lue mais qui relativise
> > beaucoup de choses.
> I
> On a dit, souvent à tort, qu’une langue est un dialecte qui a réussi,
> parce qu’il a eu une armée, mais, ce qu’on appelle dialecte ou patois peut
> faire partie d’une langue (berrichon, bourguignon, lorrain,
> saintongeais...) selon l’Unesco.
> Le français, langue artificielle, n’est pas le dialecte d’IdeF, comme l’a
> montré Molière au début de son Don Juan : on y voit des paysannes parlant à
> la mode d’IdeF et parlant de “la iau” (l’eau).


Le "français" de l'Académie a aussi effacé le parler vernaculaire
d'Île-de-France (au départ plus rural et pas le même que celui de Paris à
l'époque et qui n'était pas non plus un des argots parisiens modernes). La
France à l'époque parlait différentes langues selon les classes et
corporations. Ceux qui parlaient ces langues adaptaient leur discours à
leurs interlocuteurs, et il y avait une nette différenciation entre le
parler écrit (celui des élites) et le parler oral (la majorité de la
population).

Aujourd'hui le français s'est beaucoup parisianisé (il était nettement plus
rural au début de l'Académie, et l'Académie ou la cour de France méprisait
le parler vernaculaire parisien pour lui préférer nettement les parlers de
la Loire, avant l'Académie, la seule langue de prestige était encore le
latin d'église, déjà éloigné du latin classique, mais Louis XIV a voulu
affirmer son autonomie vis-à-vis de l'église pour imposer une autre langua
à son adminsitration qu'il voulait effiace, d'abord pour protéger son
domaine royal de base, un peu en Île-de-France, un peu en Picardie, mais
surtout la long de la Loire).

Le "français" n'a réellement réussi à s'imposer que dans les armées et sur
les galères, puis par les colons (qui ont en fait emporté une forme plus
vernaculaire sans tenir compte ensuite de ce que pouvait imposer plus tard
l'Académie ou l'administration française (sauf dans le second empire
colonial français en Afrique où l'administration était puissante et a
apporté l'écriture, l'éducation, mais aussi forgé l'élite locale et divisé
les ethnies et retenu uniquement les langues des grandes religions écrites).

Molière ne parlait pas non plus réellement le français de l'Académie (comme
l'a fait Racine), il était plus populaire et incluait des parlers
vernaculaires. Il n'a pas beaucoup utilisé les parlers occitans car il les
maitrisait mal et n'en a saisi que des bribes. Alors que les parlers
occitans avaient bonne cote à la cour de France (et d'ailleurs le roi a
voulu et demandé à l'Académie d'incorporer dans le français les locutions
occitanes : il voulait l'unité du royaume; la langue française s'est aussi
modifiée avec la prise d'autres territoires dans les guerres contre les
royaumes espagnols divisés et les Pays-Bas espagnols, mais aussi en
incorporant l'arabe et le turc qui avaient du prestige à l'époque (ce que
Molière a voulu ridiculiser pour leur usage par certaines élites
parisiennes...).

L'orthographe française, son alphabet et sa grammaire ont été un processus
très long et compliqué: il n'est pas simple de contruire une langue-chapeau
qui sera comprise par assez de monde et assez flexible pour plus ou moins
calquer certains parlers tout en retenant certaines étymologies donnant du
sens et une légitimé aux mots (mais permettant aussi d'en former de
nouveaux qui seront compris selon le modèle inventé, plus régulier que le
latin malgré les manipulations par l'église).

D'ailleurs si on parle du latin classique, il n'était pas plus une langue
unique, même à Rome seulement: c'était déjà un empire et la politique
jouait beaucoup; toutefois le latin s'est imposé en prenant quelques
auteurs classiques puis en en faisant une langue d'administration, mais il
a été très mal véhiculé dans l'empire ou les armées romaines ont incorporé
des populations différentes mais dans des tas de légions qui se
mélangeaient peu, l'influence des royaumes soumis à Rome était encore
grande, de même que les influences religieuses de toutes sortes. C'est pour
ça qu'il y a malgré tout une grande variété de langues différentes ayant
des étymons latins (mais si on regarde le dictionnaire, on peut
légitimement penser que les étymons du latin classique sont des
approximations appliquées parce que cela arrangeait les auteurs des
dictionnaires voulant faire croire à l'unité d'une langue et ne surtout pas
parler des parlers locaux)

De tout temps la "langue" a été d'abord utilisé comme instrument
d'expression du pouvoir (devant même l'autre symbole, la monnaie). Et au
gré des conquêtes ou des alliances arrangées, la langue du pouvoir a évolué
sans que celle de la popualtion évolue : on la lui a imposé. Le "langage
administratif" est toujours aussi compliqué aujourd'hui à comprendre et
arbitraire pour la population (et on le traîne maintenant comme un boulet
dans la montagne de nos lois).
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